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Klemenz Wenzel Lothar von Metternich-Winneburg

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Clement Wenceslas Lothaire ou Klemenz Wenzel Lothar von Metternich-Winneburg (Coblence, 15 mai 1773 – Vienne, 11 juin 1859), homme politique autrichien a incarné la politique de réaction à la Révolution française. Il a été considéré comme l'adversaire le plus résolu du libéralisme entre 1815 et 1848.

Le nom de sa famille vient d’un village des bords de la Moselle aux environs de Coblence, en Rhénanie. L’ascension des Metternich résulte du choix de rester fidèle au catholicisme, liant leur fortune à celle de la maison de Habsbourg.

Klemenz Wenzel Lothar von Metternich-Winneburg
Homme politique

Dates 1773-1859
Clemens Metternich.jpg
Tendance conservateur antilibéral
Nationalité Autriche Autriche
Articles internes Autres articles sur Klemenz Wenzel Lothar von Metternich-Winneburg

Citation « Les peuples n’aiment pas à regarder comme des bienfaits les leçons qu’on vient leur donner les armes à la main. »
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Jeunesse

Son père, le comte Franz-Georg, au service de l’archevêque de Trèves, obtient la main d’une Kagenegg, famille en faveur auprès de l’impératrice Marie-Thérèse et du chancelier Kaunitz. Il donne à son fils les prénoms de l’archevêque-électeur de Trèves, Clément-Wenceslas de Saxe, oncle de Louis XVI. Le troisième prénom honore la mémoire des deux princes-archevêques de la famille. Si son père était un diplomate négligent, borné et joueur, Metternich a hérité de sa mère, Marie-Béatrix de Kagenegg, sa taille élancée et ses traits aristocratiques.

Il est éduqué par l’abbé Bertrand puis par un précepteur rousseauiste, Jean-Frédéric Simon qui lui apprend la natation, l’équitation et la frugalité et l’accompagne à l’université de Strasbourg (1788). Il y fait la connaissance du prince Maximilien de Deux-Ponts, colonel du régiment de Royal-Alsace, futur roi de Bavière sous le nom de Maximilien Joseph et subit l’influence intellectuelle de Christian-Guillaume Koch.

Le 14 juillet 1792, François II devient le vingtième et dernier Habsbourg couronné empereur à Francfort. Le lendemain, Metternich ouvre le bal aux bras de Louise de Mecklenbourg, future reine de Prusse. L’empereur avait dit un jour au jeune homme : « Tenez-vous à ma disposition, c’est tout ce que je vous demande pour le moment. » En mars 1794, il fait un premier séjour à Londres, à l’origine de son admiration pour la puissance britannique.

Premières fonctions diplomatiques

Nommé ministre auprès des Provinces-Unies à la Haye, il n’a guère l’occasion d’occuper le poste. Les Français occupaient de nouveau la Belgique (juin 1794) et la famille Metternich doit trouver refuge à Düsseldorf, le comte Franz-Georg subissant la disgrâce impériale. Quittant l’Angleterre, Clément va rejoindre sa famille à l’été 1794. Il publie à cette occasion sa première brochure, Sur la nécessité d’armer tout le peuple sur les frontières françaises, où il compare l’invasion française à celle des Barbares dans le monde romain : « le but des Barbares modernes est de rompre tous les liens sociaux, de détruire tous les principes, de confisquer toute propriété. » Il propose « d’opposer la nation armée aux masses ennemies ».

Grâce à sa mère, il va faire un beau mariage en épousant Éléonore de Kaunitz, petite-fille du grand chancelier de Marie-Thérèse, le 27 septembre 1795, à Austerlitz.

Après la paix avec la France (1797) un congrès se réunit à Rastatt pour envisager les dédommagements liés à l’annexion par les Français de la Belgique et de la rive gauche du Rhin. Le comte de Metternich préside la délégation autrichienne. Le jeune Clément se voit confier la défense des intérêts des comtes de Westphalie.

le 5 février 1801, Metternich est nommé ministre plénipotentiaire d’Autriche en Saxe, occasion pour lui de première réflexions diplomatiques. A Dresde, le comte Fédor Golovkin le décrit : « bien fait, bien mis, fort blond, fort pâle ; son air distrait qui passait pour romantique auprès des femmes, passait pour réfléchi auprès des hommes. » Il rencontre à Dresde, le comte Charles de Nesselrode, chargé d’affaires du Tsar et surtout Friedrich von Gentz, qui avait traduit les Réflexions sur la Révolution de France d’Edmund Burke, acquis la réputation de polémiste brillant et qui venait de se mettre au service de l’Autriche.

Metternich est nommé à l’ambassade de Berlin (1803) pour mettre en œuvre la ligue des trois monarchies d’Europe centrale et orientale : l’Autriche, la Russie et la Prusse. Mais la Prusse devait jouer un double jeu pour obtenir le Hanovre des Français. Au soir d’Austerlitz, Napoléon couche dans le lit de Metternich au château de Kaunitz. François II devient François 1er empereur d’Autriche.

Ambassadeur en France

Alors qu’il devait être envoyé à Saint-Pétersbourg, Metternich est finalement nommé ambassadeur à Paris, Napoléon désirant « quelqu’un de la maison de Kaunitz, maison vraiment autrichienne et qui a longtemps été attachée au système de la France. » « C’est à Paris seulement que commença ma vie publique » devait écrire Metternich qui rencontre Napoléon le 10 août 1806. « Napoléon m’apparaissait comme la Révolution incarnée, tandis que dans la puissance que je représentais je voyais la plus sûre gardienne des bases sur lesquelles reposent la paix sociale et l’équilibre politique. »

Si Napoléon se montre plein d’attention avec l’ambassadeur autrichien, les relations de Metternich avec Champagny, qui a succédé à Talleyrand aux Relations extérieures, vont être exécrables. L’ambassadeur noue des relations très étroites avec son homologue russe, le général Tolstoï et avec Talleyrand qui lui dit le 16 novembre 1807 : « le système de Napoléon n’est pas le mien et ne l’a jamais été. » Les événements d’Espagne avec le renversement des Bourbons confirme son opinion sur la « politique astucieuse, destructive et criminelle de Napoléon ». Il incite le gouvernement autrichien à favoriser la rénovation et le renforcement de l’armée autrichienne. Le 15 août 1808, recevant le corps diplomatique, Napoléon s’adresse à Metternich : « Eh bien ! l’Autriche arme beaucoup ! », une discussion animée quoique d’un ton mesuré s’ensuit pendant plus d’une heure à la stupéfaction de l’assistance.

L’ambassadeur profite du départ de Napoléon pour l’Espagne pour regagner Vienne et se concerter avec Stadion et l’empereur François : collaborer avec la Russie pour sauver l’Europe de l’ambition dévorante de Napoléon et trouver des accointances côté français. « Des hommes tels que M. de Talleyrand sont comme des instruments tranchants avec lesquels il est dangereux de jouer, mais aux grandes plaies il faut de grands remèdes. »

Le 29 janvier 1809, Napoléon déclare : « l’Autriche est une puissance entièrement pourrie et il est grand temps de lui donner un soufflet. » Déprimé, Metternich s’attend à être emprisonné voire fusillé mais c’est le gouvernement autrichien qui fait arrêter le chargé d’affaires français à Vienne ce qui fait de lui un otage. Finalement, il quitte Paris le 25 mai.

Ministre de François 1er

Il assiste aux côtés de l’empereur François à la bataille de Wagram (5-6 juillet 1809). Au second jour, l’archiduc Charles annonçant la retraite inévitable, le souverain se tourne vers Metternich : « Nous aurons beaucoup à faire pour réparer le mal. » Il veut lui confier alors le ministère des Affaires étrangères (8 juillet 1809) en dépit de ses protestations : « J’ai moins peur des hommes qui doutent de leurs moyens que de ceux qui se croient capables de tout. » Mais Metternich suggère de lui donner un titre de ministre d’État en laissant provisoirement les Affaires étrangères à Stadion pour ne pas donner l’impression que l’on était disposé à capituler, les forces militaires autrichiennes étant loin d’être anéanties.

Le 26 novembre 1809, l’empereur François rentre à Vienne au milieu des acclamations tandis que Metternich s’installe officiellement à l’hôtel de Ballhausplatz comme ministre des Affaires étrangères. Il songe dès lors à faire épouser à Napoléon l’archiduchesse Marie-Louise, reprenant ainsi la politique de Kaunitz et pour empêcher un éventuel mariage avec une grande-duchesse de Russie. Le mariage célébré à Vienne en mars va être répété en France. Le 1er avril 1810, le mariage civil de Napoléon et Marie-Louise est renouvelé à Saint-Cloud et le mariage religieux le lendemain dans le salon carré du Louvre, en présence de Metternich. Trouvant Napoléon mieux disposé à l’égard de l’Autriche, le ministre s’efforce de modifier le traité de Vienne et va rester plus de six mois à Paris.

Dès qu’il apprend la défaite française en Russie (8 décembre 1812), Metternich ne perd pas de temps pour changer de cap. L’Autriche se présente comme la puissance susceptible de négocier la paix. François Ier décide d’élever Metternich à la dignité de chancelier de l’ordre de Marie-Thérèse qui était restée vacante depuis la mort de Kaunitz.

Napoléon lui demande de venir à Dresde : un entretien marathon de huit heures sans témoin (26 juin 1813) « A ce moment décisif, je me regardais comme le représentant de la société européenne tout entière. » Finalement, l’Autriche entre en guerre contre la France. Mais Metternich est loin d’avoir renoncé à amener Napoléon à la raison. Par crainte d’une hégémonie russe mais aussi d’une grande Allemagne unie, il souhaite une France réduite mais forte liée à l’Autriche.

Le 9 septembre à Teplitz, les représentants de la Russie, de la Prusse et de l'Autriche, Nesselrode, Humboldt et Metternich officialisent l’alliance de leurs trois souverains et le ministre se vante auprès de sa femme : « Il n’y a qu’un cabinet et je me trouve à sa tête. » Ce traité est plein d’arrière-pensées comme le souligne Metternich à Joseph Hudelist le 1er octobre : « La différence dans la situation des gouvernements est celle-ci, à savoir que la Russie commande à la Prusse selon son bon plaisir, tandis que nous, nous avons l’intention de manœuvrer la Russie, et nous le ferons. »

La bataille de Leipzig, « bataille des nations » (16-18 octobre 1813) porte le coup décisif au grand empire. L’empereur François pour prouver sa satisfaction lui octroie la dignité de prince. Tandis que les alliés progressent en France, Metternich et Castlereagh à Bâle (1814) dépècent l’Europe « comme un morceau de fromage ».

Le 9 mars 1814, le traité de Chaumont dit de la Quadruple Alliance est le premier pas vers un système de solidarité politique internationale qui devait être poursuivie par le ministre jusqu’au terme de sa carrière. La solidarité des alliés se manifeste par la signature d’un seul traité et l’engagement de créer un nouvel ordre européen en commun après la guerre. Le 21 avril, après l'abdication de Napoléon, François Ier l’autorise à porter les armes d’Autriche dans le premier quartier de ses armoiries familiales et lui confère la qualité de « magnat indigène » du royaume de Hongrie.

Le Congrès de Vienne

Vienne doit accueillir six monarques et plus de 200 diplomates. Metternich participe aux innombrables festivités de ce congrès dansant, notamment par une grande fête le 18 octobre dans sa « villa » nouvellement construite du Renweg et trois semaines plus tard un bal costumé : « la plus belle fête, que de l’aveu de tout le monde, on ait jamais vue » (Gentz). Talleyrand écrit à propos de Metternich à Louis XVIII : « c’est au bal et dans les fêtes qu’il consume les trois-quarts de ses journées. » ajoutant : « son grand art est de vous faire perdre du temps, croyant par là en gagner. »

Après de laborieuses conférences préalables, Metternich avait ouvert le Congrès, le 30 novembre 1814, par un discours où il donne la mesure de « sa fécondité en mots vagues et vides de sens » (Talleyrand). Fin 1814, il paraît un homme seul, en proie à la haine du Tsar et du roi de Prusse, aux intrigues de Talleyrand et mal soutenu par Castlereagh. Il ne devait pas y avoir de séances plénières mais un travail en commissions et petits comités et surtout les conversations privées des diplomates à l’occasion des festivités. Le retour de Napoléon et les Cent Jours va contraindre les alliés à dépasser leurs querelles. Apprenant la nouvelle de la bouche de Metternich, le tsar lui dit : « embrassons-nous et que tout soit oublié ».

Un des grands efforts de Metternich a été la constitution d’une Confédération germanique faute de pouvoir ressusciter le Saint-Empire pour contrecarrer les manœuvres hégémoniques de la France et de la Russie. Après de difficiles tractations l’acte constitutif du Deutscher Bund est signé le 10 juin 1815. La diète confédérale de Francfort était présidée de droit par le représentant de l’empereur d’Autriche. Ainsi, les Habsbourgs obtenaient plus d’autorité réelle sur les pays germaniques que dans l’ancien Saint-Empire.

La Sainte-Alliance

Après Waterloo,le Tsar Alexandre fait alors part de son projet d’une Sainte-Alliance que Metternich juge dans ses Mémoires un « monument vide et sonore » : « La Sainte-Alliance n’a pas été fondée pour restreindre les droits des peuples ni pour favoriser l’absolutisme et la tyrannie sous n’importe quelle forme. Elle fut uniquement l’expression des sentiments mystiques de l’empereur Alexandre et l’application des principes du christianisme à la politique. »

Les Anglais sont encore plus réticents face ce qui leur semble du nonsense. Ils proposent plus pragmatiquement un traité de la Quadruple-Alliance (20 novembre 1815) qui envisage des réunions régulières des puissances « pour le maintien de la paix en Europe. »

A l’occasion du « joli petit congrès » d’Aix-la-Chapelle (1818), la Quadruple-Alliance est confirmée par un protocole secret et la France invitée désormais à participer aux réunions. Le protocole final célèbre « les principes conservateurs qui constituent l’ordre des choses rétabli en Europe » et les « liens de fraternité chrétienne que les souverains ont formé entre eux. »

Inquiet de la situation de l’Allemagne, il écrit à sa femme : « avec l’aide de Dieu, j’espère battre la révolution allemande comme j’ai vaincu le conquérant du monde. »

Il réunit les ministres des principaux états allemands à Carlsbad pour préparer le vote de lois confédérales par la Diète de Francfort en septembre 1819, des mesures antirévolutionnaires « correctes et péremptoires » : dissolution des associations d’étudiants, surveillance de l’enseignement pour chasser professeurs et étudiants aux opinions dangereuses, censure des périodiques et brochures de moins de vingt pages.

Lors de la conférence de Vienne (25 novembre 1819-15 mai 1820) en revanche, il ne peut obtenir la remise en question des régimes constitutionnels existants dans certains états allemands mais les forces de la confédération pourront intervenir en cas de rébellion des sujets d’un prince allemand.

Face au triomphe des libéraux à Naples, les souverains d’Autriche, de Russie et de Prusse se retrouvent à Troppau (octobre 1820), la France et l’Angleterre préférant ne pas s’associer à la répression d’un mouvement libéral. Le tsar Alexandre, bien revenu de ses idées libérales, déclare à Metternich : « Ce n’est pas vous qui avez changé c’est moi. Vous n’avez à vous repentir de rien, pour moi je n’en puis dire autant. » Un droit général d’intervention est proclamé contre les gouvernements issus de révolution. Ni l’Angleterre ni la France ne pouvaient accepter l’introduction d’un « principe fédératif oppresseur ». La Sainte-Alliance prenait ainsi une existence. Le congrès invite le roi de Naples à conférer pour démontrer qu’il est de fait prisonnier des carbonari.

En janvier 1821, à Laybach, le roi Ferdinand reniant tous les serments qu’il avait fait, accepte l’intervention autrichienne dans son royaume. En mars, l’avance de l’armée autrichienne prend la forme d’une promenade militaire. Apprenant la nouvelle de l’entrée triomphales des troupes de Frimont à Naples, Metternich exulte le 28 mars : « c’est maintenant que commence la véritable restauration, la restauration morale. »

Le chancelier

Metternich peut se croire le « cocher de l’Europe ». François 1er en fait le chancelier de cour et d’État, charge vacante depuis la mort de Kaunitz. (mai 1821). Au mois d’août 1824, la diète de Francfort adopte les suggestions du chancelier : reconduction des décrets de 1819 avec une nouvelle restriction de la liberté de la presse. Il avait écrit à Dorothée de Lievin le 31 juillet : « Partout se trouve un troupeau de fidèles qui attendent leur pasteur (…) à chaque pas où je m’arrête (…) une véritable foule se presse sur mes pas, m’entoure, me regarde, me sourit et me tend les mains. »

Metternich enrage contre les deux représentants de l’esprit libéral du temps, Chateaubriand, le « ministère français, le plus inepte en politique qui fut jamais » et George Canning, « le météore malfaisant » qui ne représente et ne défend que « d’absurdes systèmes ». Il écrit le 25 avril 1824 : « le point véritable se trouve dans les deux extrêmes : dissolution de principes à Paris et à Londres ; force et union entre Vienne et Pétersbourg. »

Le protocole du 4 avril 1826 qui établit un partage de zones d’influences entre l’Angleterre et la Russie le scandalise. La France rejoint bientôt le projet d’établir une médiation entre le sultan et les grecs révoltés (traité de Londres, 16 juillet 1827). La Sainte-Alliance paraît enterrée. Mis à l’écart, Metternich doit se résigner à la création du royaume de Grèce (30 novembre 1829).

Apprenant le résultat des Trois Glorieuses le 4 août 1830, Metternich déclare : « le travail de toute ma vie est détruit. »

L’alliance conservatrice avec la Russie lui paraît « la dernière ancre de salut ». La révolution gagne l’Italie en février 1831 : Bologne, Modène, Parme. « C’est la révolution des bonapartistes soutenue par les anarchistes ». Les troupes autrichiennes rétablissent l’ordre presque sans combat. En janvier 1832, le général Radetzky occupe Bologne.

Les bonapartistes perdent un élément dynamique avec la mort du duc de Reichstadt (22 juillet 1832) qui n’a été ni maltraité ni empoisonné par Metternich en dépit de la légende. Metternich perd son précieux collaborateur, Friedrich von Gentz et le chancelier « n’a plus personne avec qui il puisse causer le matin. » Pour Metternich, « les Princes n’ont plus de choix qu’entre gouverner ou périr. (…) une Allemagne sans l’Autriche serait une Allemagne sans monarque. »

Un rassemblement patriotique et révolutionnaire à Hambach (27 mai 1832) exaltant l’idéal d’une grande Allemagne républicaine survient à propos pour inciter la diète de Francfort à adopter six nouveaux décrets préparés par le chancelier (28 juin 1832) réaffirmant l’autorité des souverains en face des assemblées représentatives et celle de la Confédération par rapport aux gouvernements la composant.

Il trouve en lord Palmerston le successeur de Canning : création d’une Grèce et d’une Belgique indépendante, encouragement aux libéraux d’Espagne, de Portugal et d’Italie.

Pour contrer les champions de la non-intervention, Metternich réussit à faire signer par les trois monarques une renaissance de la Sainte-Alliance avec l’accord de Munchengraetz (15 octobre 1833) : « Tout souverain indépendant a le droit d’appeler à son secours un autre souverain et aucune autre puissance (…) n’a le droit d’empêcher cette assistance. » Il réaffirme l’autorité de l’Autriche sur la Confédération germanique à l’occasion des conférences de Vienne (janvier-juin 1834).

La mort de François Ier (2 mars 1835) lui porte un coup. Le nouvel empereur, Ferdinand Ier est un imbécile sujet à des crises d’épilepsie et surnommé Nandel der Trottel (Nannan le Crétin) par le peuple. François Ier avait écrit dans son testament pour son successeur : « gouverne et ne change rien ». Metternich commente : « Quelle leçon pour les nations tourmentées par les progrès que cette parfaite tranquillité, ce passage sans secousse quelconque d’un règne à l’autre. »

Il organise la rencontre avec le tsar Nicolas et le roi de Prusse à Teplitz (29 août 1835). Nicolas lui dit : « Conservez-vous, car vous êtes notre clé de voûte. »

Les idées de Metternich

Insensible au principe des nationalités, il ne croit pas à la démocratie : « la souveraineté du peuple ne peut être qu’une fiction, et cela par la raison que l’idée de souveraineté étant celle du pouvoir suprême, et que ce pouvoir ne pouvant être exercé par le peuple il doit être délégué par celui-ci à une autorité autre que le souverain » (lettre à sir Travers Twiss, 11 août 1849).

Hostile au régime représentatif, il récuse la liberté de la presse : « Attribuera-t-on jamais à une publication émanant d’un gouvernement quelconque la valeur d’une expression de l’opinion publique ? Assurément non ! Par contre, il n’est pas d’obscur journaliste qui ne revendique pour ses produits l’honneur de représenter l’opinion de tous. » (Mémoires)

Pour lui, l’existence et la stabilité des États repose sur le consentement populaire, l’idée que le pouvoir vient d’en haut et la religion : « la doctrine chrétienne ne connaît aucun droit qui n’ait pour corrélatif un devoir ; elle présente pour cette raison des garanties égales à celui qui commande et à celui qui obéit. » (lettre au comte Apponyi, 22 janvier 1837). Le rôle du gouvernement est d’assurer l’ordre et de combattre les forces révolutionnaires. « Il n’existe en Europe qu’une seule affaire sérieuse, et cette affaire c’est la Révolution » (1832).

Ce conservateur refuse d’assimiler le conservatisme avec l’immobilisme : « J’ai été accusé par les coureurs d’être stationnaire. Je ne sais être stationnaire que sur les principes. Je ne sais pas l’être sur leur application. Je sais marcher et m’arrêter selon les circonstances. » Les changements nécessaires doivent venir de la libre volonté des gouvernants qui ne doivent jamais faire de concessions. Il est soucieux du maintien de la paix entre les États européens : « depuis longtemps, l’Europe a pris pour moi la valeur d’une patrie » (à Wellington, 14 juin 1824).

La chute et l'exil

La montée de l’agitation en Italie, l’échec des conservateurs en Suisse l’affectent en 1847 : « la force va régner ici-bas, et le monde est perdu. »

Découragé et abattu, il voit les monarques italiens accorder l’un après l’autre des constitutions (janvier-février 1848) tandis que la révolution agite de nouveau la France. Le chancelier ne paraît pas se douter des menaces qui pèsent sur son gouvernement, estimant impossible son renvoi « car il signifierait la révolution ».

Le 12 mars 1848, les étudiants réclament l’abolition de la censure et l’établissement d’un régime représentatif dans l’empire. Le 13 mars, la foule réclame le renvoi de Metternich.

Sa sécurité n’étant pas assurée, il doit quitter Vienne le 15 ou le 16 mars pour le château de Feldsberg, offert comme asile par le prince Charles de Liechtenstein. C’est le premier pas vers l’exil : par la Saxe, le Hanovre, il gagne les Pays-Bas (29 mars) puis l’Angleterre (20 avril). A Londres, il retrouve son vieil ami Wellington et converse avec un autre exilé, Guizot, et sympathise avec un jeune conservateur ambitieux, Benjamin Disraeli.

La fin

Il rentre à Vienne le 24 septembre 1851.

Le 20 avril 1859, François-Joseph vient consulter le vieux maître sur la question de l’Italie : « Pour l’amour de Dieu, pas d’ultimatum au Piémont » dit Metternich, « il est parti hier soir » répond penaud l’empereur. Avant de partir sur le champ de la guerre, il devait avoir un dernier long entretien (21 mai) avec le vieillard alité.

Le 25 mai, Metternich confie à Hübner : « J’ai été un rocher de l’ordre. » Il s’évanouit en apprenant la nouvelle de la défaite de Magenta (5 juin) et meurt quelques jours plus tard. Il est enterré avec ses épouses et cinq de ses enfants dans la chapelle-mausolée de Plass.

Citations

  • « Que Robespierre déclare la guerre éternelle aux châteaux ou que Napoléon la fasse aux puissances, la tyrannie est la même. »
  • « Ma biographie me fera peut-être connaître d’une manière défavorable, mais du moins elle ne sera pas ennuyeuse. »
  • « Là-bas, par-delà nos frontières orientales, trois ou quatre cent mille individus pendus, égorgés, empalés, cela ne compte guère. » (6 mai 1821, à propos de la révolte grecque)
  • « Il est vrai que je n’aime pas la démocratie ; la démocratie est partout et toujours un principe de dissolution, de décomposition. »
  • « Les peuples n’aiment pas à regarder comme des bienfaits les leçons qu’on vient leur donner les armes à la main. »

Sources

  • Guillaume de Bertier de Sauvigny, Metternich, Librairie Arthème Fayard 1998


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