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Aristide Briand

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Aristide Briand
homme politique

Dates 1862-1932
Aristide Briand.jpg
Tendance
Nationalité France France
Articles internes Autres articles sur Aristide Briand

Citation « Le rôle de l’État, dans une démocratie, n’est pas de prendre parti pour des citoyens contre d’autres »
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Aristide Briand (Nantes, 28 mars 1862 - Paris, 7 mars 1932) est un homme politique français qui a été onze fois président du conseil sous la Troisième République. Venu du socialisme, il a témoigné au pouvoir d'un esprit libéral notamment en étant le père de la loi de séparation des Églises et de l'État de 1905. Souvent ministre des Affaires étrangères, son nom est également associé au pacifisme de l'entre-deux guerres.

Du radicalisme au socialisme

Il a des origines exceptionnellement modestes pour un dirigeant de la Troisième république. Ses parents Pierre-Guillaume et Magdeleine, née Boucheau, mariés le 25 avril 1860, tiennent un modeste café à l’enseigne de La Croix-verte à Nantes. Le père ouvre bientôt un nouveau café à Saint-Nazaire. Il rêve d’abord d’être marin lui qui grandit à Saint-Nazaire. Il entre au collège (aujourd’hui lycée Aristide Briand) de Saint-Nazaire puis au lycée de Nantes et se montre bon élève. Il obtient son Bac puis, réformé du service militaire, une licence en droit à Paris. Appelé à participer à un journal radical, La Démocratie de l’Ouest, il y fait la rencontre du très jeune Fernand Pelloutier (1884). Briand est alors un radical anticlérical et libre-penseur mais déjà refusant l’idée d’une révolution sanglante. Il devient rédacteur en chef en 1885. Il commence à se faire connaître comme avocat.

Briand et Pelloutier passent du radicalisme au socialisme et ils rejoignent le Parti Ouvrier Français de Jules Guesde : dans le duo d'amis, Pelloutier est l’intellectuel, Briand l’homme d’action. Ensemble ils vont élaborer le concept de la Grève générale qui est dans l’air du temps : c’est pour eux une arme pacifique permettant une révolution sans violence.Comme il le déclare en 1892, à Marseille, au 5e Congrès de la Fédération nationale des syndicats et groupes corporatifs de France, suivi du 10e Congrès national annuel du Parti ouvrier français : « Pour que les engins meurtriers, les baïonnettes, les fusils, les canons, sauvegarde séculaire de la société oisive, deviennent inutiles, pour que les gouvernements s’écroulent, il suffira que plusieurs millions d’hommes demeurent inactifs. » Le discours le rend célèbre.

Ses diverses tentatives pour se faire élire député (en 1889, 1893 et 1898) sont des échecs. Le 3 décembre 1899, salle Japy, à Paris, s’ouvrent les États-généraux du socialisme. Aristide Briand, nouveau membre du Parti socialiste français (PSF), prône l’alliance avec les autonomes de Jaurès contre les guesdistes marxistes du Parti ouvrier français (POF) de Jules Guesde. Figure du socialisme, avocat connu, il est toujours en attente d’une circonscription où être élu. Il réussit enfin à se faire élire député dans la Loire sur une circonscription ouvrière qui englobe une partie de Saint-Étienne et le canton de Saint-Chamond, le 27 avril 1902 au premier tour.

Député et ministre

La Séparation de l’Église et de l’État est associé au nom d’Aristide Briand.De façon exceptionnelle, Aristide Briand a été le père de la loi en commission mais aussi le rapporteur du texte devant l’Assemblée et enfin, comme ministre, il a été amené à la mettre en application.

Les débats (21 mars – 3 juillet 1905), dominés par le talent oratoire de Briand sont d’une grande tenue et témoignent d’une belle hauteur de vue de la part des orateurs. Il se veut pour les catholiques le meilleur rempart contre les visées antireligieuses de la gauche et pour la gauche celui qui peut assurer la paix religieuse. Il réussit à contenter tout le monde.

La loi de séparation ne va pas se révéler facile à appliquer. Le problème va se révéler avec l’article 4 pour la dévolution des biens de l’église. Il entre dans le gouvernement Sarrien comme ministre de l’Instruction publique et des Cultes ce qui entraîne son exclusion de la SFIO (mars 1906). Il va s'efforcer de trouver une solution à la question des inventaires compliqué par l'intransigeance du pape Pie X. Briand très habilement s’est fait applaudir à droite « l’État n’a pas le droit d’être antireligieux » et à gauche « l’État est areligieux ». Soucieux d’éviter tout conflit, il fait voter une nouvelle loi le 28 mars 1907 donnant une liberté exceptionnelle à l’exercice public du culte qui fonctionne sans association cultuelle et sans déclaration préalable initialement prévus par la Séparation.

Le climat social s’est dégradé. Les fonctionnaires réclament de pouvoir constituer des syndicats ce que leur interdit le gouvernement Clemenceau. A la Chambre, Allemane attaque Briand : « Mon ancien ami Briand est un homme qui a une main gantée de fer pour frapper ses anciens amis et l’autre gantée de velours violet pour caresser ses anciens adversaires. » Le 10 mai 1907, Jaurès monte à la tribune et rappelle les propos antimilitaristes de Briand autrefois. Il conclut : « Je n’ai plus qu’un mot à dire pour résumer toute cette politique : ou pas vous ou pas ça ! » L’assemblée éclate en applaudissements tandis que Briand impassible quitte la salle, seul. Il lui répond, sans aucune note, le 13 mai. Il rappelle que pour lui la grève générale c’était le refus de la violence contrairement à la politique menée par la CGT. Il rappelle à Jaurès le soutien apporté au gouvernement Waldeck-Rousseau et son soutien à l’unité de la majorité républicaine : « Eh bien, monsieur Jaurès, moi j’ai persisté dans la voie où vous m’aviez engagé ». Il ajoute : « La classe ouvrière, avec un idéal généreux, est mal dirigée, mal orientée. (…) Appelez-la à la propriété et vous l’assagirez ! »

Fin 1907, le décès du garde des sceaux fait de lui le ministre de la justice et le numéro deux du cabinet. Il permet aux ouvriers de devenir juré d’assises. Il défend l’abolition de la peine de mort. Le 20 juillet 1909 le gouvernement Clemenceau (2 ans et 9 mois) tombe. Deux jours plus tard, Armand Fallières demande à Briand de former le nouveau ministère.

Président du conseil

Il a 47 ans. Ce qui est jeune pour un président du conseil. Il est député depuis 7 ans, ministre depuis 3 ans. Tout est allé très vite. Il prend l’Intérieur. Et compose un cabinet plus au centre que le précédent. Le 27 juillet, il est obligé de lire une déclaration d’investiture lui qui a l’habitude d’improviser. La droite s’abstient et les socialistes aussi.

Le 10 octobre 1909, dans son discours de Périgueux, il parle d’apaisement. « nous sommes à une heure où le pays sent un grand, un irrésistible besoin d’union, de concorde et de fraternité. » Il dénonce aussi les « mares stagnantes » le scrutin d’arrondissement auquel il préfère le scrutin proportionnel. Mais finalement, il s’oppose au vote par la Chambre de l’adoption de la proportionnelle ne voulant pas modifier le scrutin quelques mois avant les élections, ni rompre avec les radicaux.

Il fait voter la loi sur les retraites ouvrières et paysannes. Réélu député en 1910 en dépit de la violente campagne des socialistes révolutionnaires qui lui reprochent sa trahison, il continue à présider un gouvernement dont la composition n'a pas été modifiée.Dans les mois qui suivent, Briand devait se montrer un chef de gouvernement énergique n’hésitant pas à briser la grève des cheminots (octobre 1910). Il y a des actes de sabotage et un ouvrier non-gréviste est tué par des grévistes. La grève s’étend aux maçons et aux électriciens. Il décide de décréter la mobilisation des cheminots. Les compagnies sont privées mais c’est un service public. Il tient de fermes propos le 29 octobre 1910 :

« Est-il admissible que dans l’espoir d’assurer le succès de leurs revendications, les agents qui ont volontairement assumé la charge d’un service public et qui à ce titre, bénéficient d’avantages spéciaux, désertent ce service et en arrêtent le fonctionnement au détriment de l’ensemble des citoyens, qu’ainsi et par contrecoup ils paralysent la vie nationale et que même ils risquent de mettre en danger la Patrie en laissant ses frontières ouvertes, dépourvues de leurs moyens de défense ? »

Les socialistes le traitent de dictateur et tentent de le déloger de la tribune. Lui qu’on présente toujours comme un « monstre de souplesse » a tenu à rappeler la nécessité d’un exécutif qui en soit pas soumis à la Chambre. Le lendemain, il sait habilement retourner la situation : « Regardez mes mains : pas une goutte de sang » Le député radical-socialiste Malvy (24 février 1911) reproche au gouvernement de ne pas faire appliquer la loi sur les congrégations avec assez de vigueur et cite l’exemple du collège jésuite de Saint-Étienne qui n'est pas encore fermé. Il préfère démissionner sans attendre d’être renversé le 27 février.

Il revient au pouvoir dans le gouvernement Poincaré comme ministre de la justice (janvier 1912).C’est lui qui incite Raymond Poincaré à être candidat à l’élection présidentielle et favorise son succès. Briand redevient ainsi président du conseil mais pour un bref gouvernement (janvier-mars 1913) où il est poursuivi de la haine de Clemenceau. Il décide de soutenir l’allongement du service militaire à trois ans à la grande indignation des socialistes. Jaurès s’écrie : « C’est un crime contre la République et contre la France ! » Mais c’est sur la question de la réforme du scrutin, l’adoption de la proportionnelle que le gouvernement tombe.

Caillaux, l’aigle du radicalisme l’attaque violemment, le traitant d’endormeur. Il répond par le discours de Saint-Étienne en décembre 1913. Briand défend sa politique de l’apaisement rappelant les propos qu’il avait tenu à la gauche lors des débats sur la Séparation : le pouvoir n’a rien à faire dans la bataille des idées.

« La France n’a pas fait le si rude effort de se donner la liberté, de s’affranchir du pouvoir exécutif personnel pour gémir et étouffer sous une poussière de tyrannies locales. Le rôle de l’État, dans une démocratie, n’est pas de prendre parti pour des citoyens contre d’autres, d’employer la force qu’il tient de la loi, de la nation, et qui doit être au service de tous les citoyens, pour la tourner en tyrannie contre des opinions qui ne lui conviennent pas. L’État doit rester neutre entre les citoyens dans la bataille. Sa puissance administrative ne doit pas opprimer des consciences, ni des opinions. Il ne doit pas mettre les faveurs ou les représailles au service des électeurs dans la bataille électorale. Il ne doit avoir que des idées libres se rencontrant librement devant le suffrage universel souverain et arbitre.  »

S’il est réélu sans problèmes député en 1914, Briand sait qu’il n’a aucune chance de faire partie d’une combinaison ministérielle dans une Chambre dominée par les radicaux et les socialistes. Mais la guerre va tout changer.

La Grande guerre

Le 26 août 1914 il est vice-président du conseil en charge de la Justice du cabinet Viviani. C’est l’Union sacrée avec Jules Guesde ministre d’État sans portefeuille. Briand regrette cependant qu’aucun homme de droite n’ait été appelé au gouvernement. Pour David Lloyd George, il est « l’homme le plus intelligent du gouvernement ». Aussi quand Viviani jette l’éponge, Briand lui succède. Clemenceau refuse d’entrer dans un gouvernement dont il ne serait pas le chef. Briand fait entrer un homme de droite, Denys Cochin aux côtés de Jules Guesde. Cette fois c’est vraiment l’union sacrée. Le 3 novembre 1915, il déclare aux députés : La France « est aujourd’hui l’épée à la main, le champion du droit, se battant pour la civilisation et pour l’indépendance des peuples. Quand elle abaissera son épée, c’est qu’elle aura obtenu toutes les garanties d’une paix durable, d’une paix solide. » Il obtient la confiance par 515 voix contre 1 et 25 abstentions. Pour la première fois il a pris le portefeuille des Affaires étrangères.

Il obtient que la prépondérance de la France dans la conduite des opérations soit reconnu par les Alliés et notamment les Anglais. Il réussit à empêcher les parlementaires de s’ingérer dans les affaires militaires. Clemenceau furieux de la réussite de Briand n'hésite pas à dire : « Nous attendons Briand à la chute de Verdun ». En 1917, le prestige de Briand a baissé. Il n’est toléré par le Parlement que « parce qu’on n’a personne à mettre à sa place ». Il démissionne finalement le 18 mars. La presse française et alliée lui tresse alors des couronnes.

Clemenceau au pouvoir poursuit de sa vindicte Briand. Il le soupçonne de vouloir revenir au gouvernement avec l’aide de Poincaré. La victoire obtenue, Briand se montre sceptique sur le « Traité de Versailles ». Il déclare à Saint-Chamond le 20 août 1919 : « L’heure est grave. La paix n’est pas faite. » Briand n’a pas eu voix au chapitre, lui qui a conduit la France pendant 18 ans n’est même pas invité à participer aux négociations. Clemenceau, le Père la Victoire, candidat à la Présidence de la République, n’hésite pas à dire « Si je suis élu, le camarade Briand battra la semelle sur le trottoir de l’Elysée pendant sept ans. » Aussi Briand incite-t-il Paul Deschanel à se présenter. Comme la droite hésite à détruire une légende, Briand réplique : « Eh bien ! votez pour Deschanel en criant : Vive Clemenceau ! » Entre-temps, Briand a quitté Saint-Étienne, qui penche trop à gauche, pour se faire élire à Nantes.

Retour au pouvoir

Briand est appelé en janvier 1921 à la Présidence du Conseil. Il prend une nouvelle fois le Quai d’Orsay. Il va renouer les relations diplomatiques avec le Vatican sans renier sa loi de 1905. Restant sévère vis-à-vis de l’Allemagne, il s’efforce d’alléger ses dettes,politique ambiguë s’il en fut, et qui fait dire au clemenciste André Tardieu qu’il mène une politique de chien crevé au fil de l’eau.

En février 1922, Briand et les Anglais décident d’organiser à Cannes une conférence interalliée destinée à examiner la possibilité d’alléger la dette de l’Allemagne. Les Allemands sont invités à cette conférence. Entre deux séances de travail, Briand se fait donner une leçon de golf par le Premier Ministre anglais David Lloyd George. La photo prise par les journalistes fait le tour du monde. A Paris, on crie à l’humiliation de la France et Briand est convoqué à Paris pour s’expliquer devant les députés. Il s’en va écoeuré de l’attitude de Millerand et de la trahison d’une partie de ses ministres. Il a près de 60 ans et se sent fatigué.

En 1924, Edouard Herriot le nomme membre de la délégation française à la SDN, ce qui limite ses ambitions. Il faudra qu’il attende la chute du Gouvernement Herriot, qui a cru malin de réveiller l’anticléricalisme, pour que le Président de la République et le nouveau Président du Conseil, Paul Painlevé, l’appellent au Ministère des Affaires Etrangères. Nous sommes en avril 1925 et Briand va occuper cette fonction pratiquement jusqu’à sa mort en 1932.

Le ministre des Affaires étrangères

Il va mener une politique de réconciliation avec l’Allemagne en favorisant les relations avec Gustav Stresemann. Une conférence se tient à Locarno, en Suisse, du 5 au 16 octobre 1925 et se termine par la signature d’un traité entre les différents pays concernés qui acceptent de régler par arbitrage les questions des frontières résultant du Traité de Versailles. La France promet d’évacuer la Rhénanie. L’Angleterre s’associe à ce traité qui provoque un enthousiasme indescriptible dans chacun des pays. Redevenu président du conseil (28 novembre 1925)Briand va donc devoir déployer des trésors d’éloquence pour convaincre les députés français : « je fais la politique de notre natalité. » Le 26 février 1926, les accords de Locarno seront approuvés par la Chambre des Députés à une écrasante majorité.

Mais le gouvernement tombe le 6 mars 1926 : la Chambre est décidément ingouvernable. « Vous revenez bien souvent, Messieurs » déclare Gaston Doumergue, furieux d’avoir été réveillé de bon matin. Et il demande à Briand de constituer le nouveau gouvernement. Celui-ci tombe le 15 juin et Briand doit constituer à nouveau une équipe : qui tiendra un mois… cette fois Briand s’en va pour de bon…pour revenir quelques jours plus tard ministre des Affaires étrangères du cabinet Poincaré.

Le 10 septembre 1926, l’Allemagne est admise à la SDN dans l’enthousiasme général. Aristide Briand devant les 48 membres de la Société des Nations va prononcer son plus célèbre discours :

« Entre l’Allemagne et la France, c’en est fini des rencontres douloureuses et sanglantes dont toutes les pages de l’Histoire sont tachées. C’en est fini des longs voiles de deuil. Plus de guerres, plus de solutions brutales et sanglantes à nos différends ! Certes, ils n’ont pas disparu mais, désormais, c’est le juge qui dira le droit. Arrière les fusils, les mitrailleuses et les canons ! Place à l’arbitrage, à la conciliation et à la paix. »

« L’ère euphorique Briand-Stresemann » se conclue par un événement important qui les rapproche encore : le Prix Nobel de la Paix en décembre 1926.

Aristide Briand trouve en Frank Kellogg le Secrétaire d’Etat américain, un partenaire qui partage tout à fait ses sentiments. Dès février 1928, Briand et Kellogg se concertent pour imaginer une conférence à laquelle seraient invités tous les pays désireux de créer des conditions nécessaires à l’établissement d’une paix durable. Cette fameuse conférence se tient à Paris, en août 1928. Elle se conclut par un traité : le Pacte Briand-Kellogg auquel souscrivent de nombreux pays. L’article 1 de ce pacte stipule que « les parties contractantes déclarent solennellement, au nom de leurs peuples respectifs, qu’elles condamnent le retour à la guerre pour le règlement des controverses internationales et y renoncent en tant qu’instrument de politique nationale dans leurs relations mutuelles ». La presse française titre sur les »noces spirituelles de Briand et de la paix ». Seuls 12 députés votent contre la ratification, le sénat vote à l’unanimité.

L’Européen

L’adoption du Plan Young, à la Conférence de La Haye, en août 1929, prévoit un échelonnement des dettes de l’Allemagne et l’évacuation de la Rhénanie. Briand en profite pour égratigner le traité de Versailles (17 juillet 1929) : « On m’a demandé parfois d’en tirer des choses merveilleuses : je l’essaie. Ce n’est pas toujours très facile. Il y a des cas où, avec la meilleure volonté du monde, un homme à qui on remettrait un sac de charbon aurait de la peine à en tirer de la farine. » Poincaré s’étant retiré, Briand forme son 11e cabinet. C’est à lui de négocier aux Pays-Bas.

Briand dévoile ses intentions, dans un discours qu’il prononce le 5 septembre 1929, à la tribune du SDN.

« Je pense qu’entre des peuples qui sont géographiquement groupés comme les peuples d’Europe, il doit exister une sorte de lien fédéral ; ces peuples doivent avoir à tout instant la possibilité d’entrer en contact, de discuter leurs intérêts, de prendre des résolutions communes, d’établir entre eux un lien de solidarité qui leur permette de faire face, au moment voulu, à des circonstances graves si elles venaient à naître. C’est ce lien que je voudrais m’efforcer d’établir. »

Le 22 octobre, de retour à la Chambre, il voit fondre sur lui la droite et la gauche coalisés, ce qui ne le surprend pas : « en politique, je suis assez difficile à surprendre. » Le gouvernement est renversé. Le nouveau président du Conseil, Tardieu, maintient Briand au Quai d’Orsay.

La SDN a demandé à Briand de rédiger un mémorandum adressé aux 26 gouvernements européens, en mai 1930 :

«  L’organisation économique de l’Europe qui devrait tendre aux rapprochements des économies européennes, réalisée sous la responsabilité politique des Gouvernements solidaires par l’établissement d’un Marché commun ayant pour but l’élévation au maximum du niveau de bien-être humain sur l’ensemble des territoires de la Communauté européenne où serait facilités la circulation des marchandises, des capitaux et des personnes. »

Seuls la Bulgarie, la Tchécoslovaquie, les Pays-Bas, la Pologne et la Grèce ont accepté. Les autres pays, et notamment les Grands, l’Allemagne, l’Italie, l’Angleterre, la Suède ont trouvé de bonnes raisons pour rejeter les propositions de Briand. Pour enterrer le projet la SDN crée une commission pour la réalisation d’une Union européenne dont la présidence est confiée à Briand.

En janvier 1931, Pierre Laval succède à Tardieu et conserve Briand. Poussé par son entourage et une partie de la gauche (dont Blum) Briand rate sa chance en se présentant trop tardivement à l’élection présidentielle de mai 1931. Il n’obtient que 401 voix contre 441 à Doumer et il se retire pour permettre l’élection de son rival. Gaston Doumergue, le console en lui disant : « Mon cher Briand, voyez Jules Ferry, voyez Clemenceau, aucun grand homme n’est jamais devenu Président de la République. » Briand qui voulait abandonner le ministère sort en disant : « Doumergue a réussi à m’émouvoir. »

A la demande de Laval, il donne sa démission en janvier 1932 et décède le 7 mars de la même année. Apprenant la nouvelle, les députés décident aussitôt de lever la séance. Même s’il a vécu et est mort en libre penseur, le cardinal Verdier vient bénir sa dépouille, hommage de l’église à celui qui a su lui rendre sa place en France. Lors des obsèques nationales, on entend le cri de « Vive la Paix ».

Citations

  • « La République se doit à elle-même de traiter l’église d’une façon libérale et juste » (Briand dans l’Éclaireur, 8 octobre 1904)
  • « Il y a des curés dans l’église catholique, il y a aussi des évêques, il y a même un pape. Que voulez-vous ? Ce sont des mots qui peuvent écorcher les lèvres de certains d’entre vous, mais qui correspondent à des réalités.(…) Vous voulez faire une loi qui soit braquée sur l’Église comme un revolver ? Ah vous serez bien avancés quand vous aurez fait cela !» (22 avril 1905)
  • « La politique est l'art de concilier le désirable avec le possible »

Sources

  • Gérard Unger, Aristide Briand, le ferme conciliateur, 658 p., Fayard 2005

Liens externes


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