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Entrepreneur post-carcéral

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L'entrepreneuriat des anciens détenus constitue une problématique complexe et souvent négligée. Après leur sortie de prison, ces individus font face à de nombreux défis pour reconstruire leur vie et trouver un sens à leur existence. Parmi les options qui s'offrent à eux, la création d'entreprise se présente comme une voie possible, mais elle est particulièrement difficile à cause du manque d'accompagnement et de réseau. Pour réussir dans cette démarche, il est crucial de comprendre l'importance de l'accompagnement adapté et des qualifications appropriées pour surmonter les barrières rencontrées.

Importance de l'accompagnement et des qualifications pour surmonter les barrières à l'entrepreneuriat

L'accompagnement et les qualifications jouent un rôle essentiel dans le processus de réinsertion des anciens détenus[1] par le biais de l'entrepreneuriat. Lorsqu'ils sortent de prison, ces individus sont confrontés à des fragilités mentales, à l'infantilisation et à la déresponsabilisation, qui ont souvent été exacerbées pendant leur détention. Pour reprendre le contrôle de leur vie et se reconstruire, certains optent pour l'entrepreneuriat, espérant ainsi se réinsérer durablement dans la société.

Cependant, se lancer dans l'entrepreneuriat en tant qu'ancien détenu présente de nombreux obstacles. Parmi ceux-ci, le manque d'accompagnement adapté et de réseau constitue un défi majeur. Les détenus, tant pendant leur incarcération que lors de leur sortie, font face à des difficultés telles que l'isolement social, la rupture des liens familiaux et amicaux, ainsi que le manque de soutien financier et logistique.

Pour réussir dans leur entreprise, les anciens détenus ont besoin d'un accompagnement spécifique qui leur permette de développer les compétences entrepreneuriales nécessaires. Ce soutien peut prendre la forme de formations, de conseils, de mentorat et de réseautage. De plus, il est crucial de reconnaître les qualifications et les expériences acquises avant, pendant ou après la période de détention, afin de renforcer la confiance en soi et de favoriser l'employabilité des anciens détenus entrepreneurs.

En somme, l'accompagnement et les qualifications adaptés sont des éléments clés pour surmonter les barrières à l'entrepreneuriat des anciens détenus. Ces individus ont besoin de soutien pour développer leurs compétences, construire leur réseau professionnel et surmonter les obstacles administratifs et sociaux auxquels ils sont confrontés. En leur offrant une deuxième chance et en leur donnant les moyens de se réinsérer, nous pouvons favoriser leur réussite entrepreneuriale et contribuer à leur réintégration dans la société.

Les motivations des anciens détenus à entreprendre

La création d'entreprise après la sortie de prison est motivée par divers facteurs qui témoignent des aspirations et des besoins des anciens détenus. Cette section se penche sur les motivations profondes qui les poussent à entreprendre malgré les nombreux obstacles auxquels ils sont confrontés.

Besoin de reconstruction et de sens après la prison

Pour de nombreux anciens détenus, la création d'entreprise représente une opportunité de se reconstruire et de retrouver un sens à leur vie. Après avoir vécu une période de privation de liberté et d'isolement, ils ressentent le besoin de reprendre en main leur destin et de donner une nouvelle direction à leur existence. L'entrepreneuriat devient alors un moyen de se réapproprier leur identité, de renforcer leur estime de soi et de se réintégrer dans la société de manière productive.

Volonté de liberté et d'indépendance

Une motivation centrale chez les anciens détenus est la volonté de liberté et d'indépendance. Beaucoup d'entre eux expriment le refus de travailler pour quelqu'un d'autre après avoir vécu l'expérience de la prison. Ils aspirent à être maîtres de leur destin, à ne plus dépendre des décisions et des contraintes imposées par un employeur. L'entrepreneuriat leur offre la possibilité de créer leur propre entreprise, de prendre des décisions autonomes et de jouir d'une plus grande liberté dans leur vie professionnelle.

Recherche d'une deuxième chance et de réinsertion sociale

Pour certains anciens détenus, la création d'entreprise constitue une occasion de saisir une deuxième chance et de prouver à la société qu'ils sont capables de se réinsérer de manière positive. Ils refusent d'être perçus comme une charge pour les autres et souhaitent montrer leur détermination à rendre service à la communauté. L'entrepreneuriat devient alors un moyen de restaurer leur estime de soi, de reconstruire des liens sociaux et de s'intégrer économiquement.

Cas d'étude : témoignages d'anciens détenus ayant créé leur entreprise

L'étude (2016) réalisée par Maryline Bourdil et Walid A. Nakara, enseignants-chercheurs à la Montpellier Business School, met en lumière les parcours inspirants d'anciens détenus ayant fondé leur entreprise après la prison. Les témoignages recueillis auprès de ces individus mettent en évidence leur volonté de continuer leur vie à travers l'entrepreneuriat. Certains ont choisi des secteurs variés tels que la restauration, l'artisanat ou l'informatique, tandis qu'un autre est devenu auteur de contes. Ces exemples concrets illustrent comment la création d'entreprise peut constituer un moyen efficace de reconstruction et de réinsertion pour les anciens détenus.

Les raisons pour lesquelles les anciens détenus peuvent devenir de bons entrepreneurs

Le taux élevé de récidive[2] parmi les détenus libérés attire l'attention, en particulier dans le contexte des statistiques d'incarcération aux États-Unis. Avec un intérêt croissant pour la réforme pénitentiaire, l'article d'Andrew Medal (2018)[3] discute des raisons pour lesquelles les anciens détenus pourraient exceller en tant qu'entrepreneurs en raison de leurs qualités uniques.

L'article suggère que les anciens détenus possèdent des qualités qui se marient bien avec l'entrepreneuriat, grâce à leurs compétences en démarrage avec des ressources limitées, à leur adaptabilité face à l'incertitude et à leur mentalité de transgression des règles. Cette perspective encourage un changement vers la réhabilitation par l'éducation entrepreneuriale et le soutien à certains anciens détenus aspirants entrepreneurs.

Experts en Démarrage avec des Ressources Limitées

Les détenus en prison font face à de graves limitations en termes de ressources et doivent innover pour survivre. La pénurie de biens essentiels pousse les détenus à adopter une mentalité entrepreneuriale improvisée avec des ressources limitées à leur disposition (bricolage entrepreneurial). La nécessité de trouver des moyens créatifs pour générer des ressources supplémentaires favorise une aptitude naturelle pour le démarrage avec des ressources limitées, une compétence cruciale pour le succès d'une startup.

À l'Aise avec l'Inconnu

La nature dynamique et incertaine de la vie en prison prépare les détenus à embrasser l'ambiguïté (tolérance à l'ambiguïté). Les environnements en constante évolution et les situations imprévisibles aident les détenus à se familiariser avec l'inconnu. Cette adaptabilité se traduit bien dans le monde des startups, où les défis quotidiens exigent une réflexion rapide et une résilience entrepreneuriale.

Mépris Sain pour les Règles

Les entrepreneurs et les anciens détenus partagent un mépris caractéristique pour les règles réglementaires traditionnelles. Pour les entrepreneurs, cette caractéristique peut conduire à des percées innovantes, tandis que pour les anciens détenus, cela a peut-être contribué à leur incarcération. Lorsqu'il est dirigé de manière positive, ce trait devient une force motrice pour le succès, tant dans le monde entrepreneurial que dans la vie après l'incarcération. Il assimile alors les valeurs de l'entrepreneur évasif.

En conclusion, l'article d'Andrew Medal met en évidence la nécessité d'une réforme pénitentiaire et souligne les défis auxquels sont confrontés les anciens détenus après leur libération. Il propose l'entrepreneuriat comme une alternative viable à l'activité criminelle, en soulignant l'importance d'enseigner aux anciens détenus les compétences entrepreneuriales et commerciales pour leur réintégration dans la société.

La Théorie de Baumol : L'Entrepreneuriat Productif, Improductif et Destructeur

Dans son essai renommé "Entrepreneuriat : Productif, Improductif et Destructeur"[4], William Baumol avance l'argument selon lequel, bien que la quantité d'entrepreneurs potentiels dans une société donnée soit relativement fixe, ce sont les structures d'incitation et les institutions de la société qui déterminent s'ils finissent en criminels ou en entrepreneurs légitimes. Dans une société où les opportunités commerciales légales sont rares, ou lorsque les inégalités éducatives et économiques désavantagent ceux issus de milieux défavorisés, de nombreux aspirants entrepreneurs se retrouvent plutôt dealers de drogue ou fraudeurs. Si la théorie est avérée, alors la mission de la politique publique n'est pas d'accroître le nombre d'individus dotés de traits entrepreneuriaux, mais plutôt de veiller à ce que ceux qui possèdent déjà ces traits les appliquent de manière légale.

La Stabilité des Capacités Entrepreneuriales

William Baumol avance l'idée fondamentale que la quantité d'individus dotés de capacités entrepreneuriales demeure relativement stable au sein d'une société. Cela signifie que le potentiel de générer des idées novatrices et de créer des entreprises existe en nombre constant parmi la population. Toutefois, ce potentiel peut être canalisé de différentes manières en fonction des incitations et des structures en place dans la société.

L'Influence des Incitations Sociales

Les incitations sociales jouent un rôle crucial dans la façon dont les individus choisissent de mettre en œuvre leurs capacités entrepreneuriales. Si la société offre des opportunités et des récompenses pour la création d'entreprises légitimes, les individus sont plus enclins à exploiter leurs compétences entrepreneuriales de manière positive. En revanche, si les incitations à entreprendre légalement sont limitées et que les obstacles sont élevés, certains individus pourraient être tentés de se tourner vers des activités illégales, telles que le crime organisé.

Le Pouvoir des Institutions

Les institutions de la société, telles que les systèmes éducatifs, les règles réglementaires et les mécanismes de soutien aux entrepreneurs, jouent également un rôle crucial dans l'orientation des traits entrepreneuriaux. Si ces institutions sont favorables à la création d'entreprises légales et fournissent les outils nécessaires pour réussir, les individus seront plus enclins à canaliser leurs compétences entrepreneuriales vers des projets licites. En revanche, des obstacles institutionnels peuvent pousser certains individus à opter pour des voies illégales.

La Politique Publique et l'action entrepreneuriale

Si la théorie de William Baumol s'avère juste, la tâche de la politique publique serait de s'assurer que les individus possédant des traits entrepreneuriaux les mettent en œuvre de manière légale. Plutôt que d'augmenter simplement la quantité de personnes avec ces traits, il s'agit de créer un environnement favorable où les caractéristiques entrepreneuriales peuvent être canalisées vers des activités entrepreneuriales licites.

En somme, William Baumol met en lumière comment l'État peut influencer la destinée des individus dotés de traits entrepreneuriaux. La théorie souligne l'importance de créer des opportunités commerciales légales pour favoriser l'utilisation positive de ces traits. La politique publique, dans cette optique, a pour rôle de créer les conditions nécessaires pour que les caractéristiques entrepreneuriales puissent être mises en pratique de manière légale et bénéfique pour la société dans son ensemble.

Informations complémentaires

Notes et références

  1. Laetitia Lienhard, "Anciens détenus, ils sont devenus chefs d'entreprise après la prison", publié le 14 novembre 2018 sur le site Les Echos, consulté le 9 août 2023
  2. P. Błędowski, J. Felczak, E. Gałecka-Burdziak, M. Góra, 2023, "Incarceration experience at older ages. Does employment protect against recidivism?", Economics & Sociology, Vol. 16, n°1,
  3. "Ex-Convicts Make the Best Entrepreneurs. Here Are 3 Reasons Why", article écrit par Andrew Medal, publié le 8 juin 2018 sur le site entrepreneur.com, consulté le 9 août 2023
    Andrew Medal, l'auteur de l'article, est un entrepreneur et investisseur providentiel. Ses propres expériences de création d'une entreprise après avoir été incarcéré nourrissent ses idées sur le potentiel des anciens détenus en tant qu'entrepreneurs à succès.
  4. William Baumol, 1990, "Entrepreneurship: productive, unproductive and destructive", Journal of Political Economy, Vol 98, n°5, pp893–921

Bibliographie

  • 2016, Maryline Bourdil, Walid A. Nakara, "Entrepreneuriat et prison : une étude exploratoire sur la création d'entreprise par des anciens détenus", Revue de l'Entrepreneuriat, Vol 16, n°2, pp109-139