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Sébastien Castellion

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Sébastien Castellion
Théologien

Dates 1515-1563
Sébastien Casteillon
Tendance Réformateur protestant Tolérance et liberté religieuse
Nationalité France France
Articles internes Autres articles sur Sébastien Castellion

Citation "Tuer un homme, ce n'est pas défendre une doctrine, c'est tuer un homme."
Interwikis sur Sébastien Castellion

Sébastien Castellion, né près de Nantua dans la région du Jura en 1515, plus précisément à Saint-Martin-du-Fresne, en Bugey, anciennement du duché de Savoie, de l'actuel département de l'Ain et mort le 29 décembre 1563 à Bâle, en Suisse, était un humaniste, bibliste et théologien. Il a évolué dans un contexte historique marqué par les bouleversements de la Réforme protestante au XVIe siècle.

De nos jours, Sébastien Castellion est reconnu comme un défenseur éminent de la tolérance et de la liberté de pensée. Son héritage s'est cristallisé autour de ses positions courageuses en faveur de l'ouverture d'esprit et de la diversité d'interprétation de la bible. La modernité de sa pensée est saluée pour avoir anticipé des idées fondamentales sur la liberté religieuse qui restent pertinentes aujourd'hui. Sébastien Castellion est souvent qualifié d'apôtre de la tolérance en raison de son plaidoyer en faveur de l'acceptation des différentes interprétations bibliques et de son rejet de la violence au nom de la foi. Sa réputation contemporaine repose sur son engagement en faveur d'une vision pluraliste du christianisme, soulignant la coexistence pacifique des différentes croyances.

Parcours intellectuel et religieux de Sébastien Castellion

  • . Conversion au protestantisme. Sébastien Castellion a marqué son entrée dans l'histoire en adoptant le protestantisme. Cette conversion, probablement influencée par les idées réformatrices qui secouaient l'Europe au XVIe siècle, a jeté les bases de son engagement ultérieur en faveur de la liberté de pensée. Sa décision de rejoindre les rangs des réformés a été un choix crucial qui l'a conduit à explorer les nuances théologiques et à remettre en question les doctrines traditionnelles.
  • . Rencontre avec Calvin à Strasbourg. Il s'est convertit au protestantisme, un choix qui le conduira à des rencontres cruciales avec des figures majeures de la Réforme, dont Jean Calvin à Strasbourg en 1540. Après son retour à Genève, Calvin lui confie la direction du Collège de Rive. Cependant, des divergences d'opinions l'ont empêché de réaliser son désir de devenir pasteur à Genève. En 1545, il s'installe à Bâle, où il exercera divers métiers, y compris celui de critique littéraire. La rencontre avec Jean Calvin à Strasbourg en 1540 a profondément marqué le parcours de Castellion. Calvin, une figure dominante de la Réforme, avait déjà commencé à exercer une influence significative sur le mouvement protestant. La collaboration entre les deux hommes a débuté lorsque Castellion a été appelé à Strasbourg, où il a pu s'immerger dans l'intellectuel bouillonnement de la Réforme. Cette période a probablement contribué à forger certaines des idées clés qui caractériseront plus tard son plaidoyer pour la liberté religieuse.
  • . Différends avec Calvin à Genève. De retour à Genève, Castellion se voit confier la direction du Collège de Rive par Calvin. Cependant, des divergences d'opinions surgissent entre les deux hommes, principalement sur des questions théologiques et doctrinales. Castellion, plus enclin à la tolérance et à l'ouverture d'esprit, ne pouvait souscrire à certaines des positions plus rigides de Calvin. Ces différends ont, malheureusement, écarté Castellion de la possibilité de devenir pasteur à Genève, mais ont aussi été l'incubateur de sa pensée indépendante.
  • . Installation à Bâle et enseignement à l'Université. En 1545, après ces désaccords avec Calvin, Castellion décide de s'installer à Bâle. Cette période de sa vie est marquée par une diversité d'activités, y compris des travaux dans différents domaines tels que la critique littéraire. Cependant, son engagement envers l'éducation demeure constant, et en 1553, il accède à un poste d'enseignant de grec à l'Université de Bâle. C'est à travers cette position que Castellion a pu continuer à façonner les esprits, partageant ses idées avant-gardistes et influençant la pensée de ceux qui le côtoyaient.

Contributions de Castellion à la liberté religieuse

  • . Précurseur de la liberté d'interprétation biblique. En 1555, Sébastien Castellion réalise une contribution majeure en publiant sa traduction complète de la Bible, tant de l'Ancien que du Nouveau Testament. Cette traduction se démarque par son caractère révolutionnaire, affirmant la nécessité d'une liberté d'interprétation biblique. Il reconnaît explicitement l'ambiguïté de certains passages bibliques, soulignant que diverses interprétations sont possibles. Sa traduction adopte un langage familier afin d'être accessible aux personnes non éduquées. Cette approche, bien que novatrice, suscite des critiques, car l'utilisation d'expressions très vernaculaires était alors considérée comme indigne de la grandeur de la Bible. Pourtant, cette méthode de traduction révolutionnaire anticipait les traductions modernes de la Bible en français, montrant l'avant-gardisme de Castellion en matière de liberté d'interprétation biblique.
  • . Opposition à la violence religieuse. L'exécution de Michel Servet à Genève en 1553, pour avoir refusé d'accepter la doctrine de la Trinité, a profondément choqué Sébastien Castellion. Ce tragique événement a été un catalyseur pour son engagement actif contre la violence religieuse. En réaction à l'exécution de Servet, il écrit le "Traité des Hérétiques" sous un pseudonyme. Cette œuvre est une anthologie d'anciens et de modernes textes condamnant la peine de mort pour divergence doctrinale. Castellion se positionne fermement contre l'idée de tuer en raison de croyances religieuses divergentes, énonçant la célèbre phrase : "Tuer un homme, ce n'est pas défendre une doctrine, c'est tuer un homme."
  • . Plaidoyer pour la liberté de religion. En 1562, Sébastien Castellion publie "Conseil à la France désolée", exposant son plaidoyer en faveur de la liberté religieuse. Il y défend l'idée que les deux religions, catholique et protestante, devraient coexister librement, permettant à chacun de choisir sa foi sans contrainte. Il critique sévèrement le "forcement des consciences" dans son conseil à la France, soulignant que c'est la principale cause des troubles et des guerres. Il insiste sur la nécessité de laisser chaque individu choisir librement sa foi sans ingérence coercitive. Malheureusement, en 1563, le Synode réformé de Lyon condamne le livre de Sébastien Castellion, dénonçant ses idées sur la liberté religieuse. Cette condamnation reflète les tensions doctrinales au sein de la Réforme et illustre la résistance à l'idée de laisser les individus choisir leur foi sans contrainte.

Écrits théologiques de Sébastien Castellion

  • . Critique de la doctrine de la prédestination de Calvin. Sébastien Castellion s'engage activement dans la théologie critique en remettant en question la doctrine de la prédestination de Jean Calvin. Contrairement à Calvin, qui soutenait la prédestination inconditionnelle, Castellion exprime ses réserves. Sa critique porte sur la vision de Calvin selon laquelle Dieu aurait prédestiné certaines personnes au salut et d'autres à la damnation, sans égard à leurs actions. Castellion, préoccupé par les implications morales de cette doctrine, plaide pour une vision plus compatissante de Dieu, remettant ainsi en question l'austérité de la prédestination calviniste.
  • . Modernisation des règles de la lecture biblique. Dans son œuvre majeure, "De l'art de douter et de croire, d'ignorer et d'avoir", Sébastien Castellion pose les fondements de sa philosophie théologique. Il propose une approche moderne de la lecture de la Bible, soulignant l'importance de prendre en considération le contexte, le genre littéraire, et de marquer la distinction entre les messages divins et les écrits humains. Cette approche avant-gardiste de l'interprétation biblique va à l'encontre des méthodes plus dogmatiques de son époque. Il insiste sur la foi en tant que confiance en Dieu plutôt que comme une adhésion stricte à une doctrine préétablie. Il élargit la conception traditionnelle de la foi, encourageant une approche plus personnelle et axée sur la relation avec le divin. Cette perspective non dogmatique reflète son engagement envers la liberté de pensée et la diversité spirituelle. Un aspect significatif de la pensée de Castellion dans cet ouvrage est son refus d'opposer la raison à la foi. Il encourage la coexistence harmonieuse de la raison et de la foi, soulignant que l'une peut compléter l'autre plutôt que de s'y opposer. Cette approche éclairée favorise une spiritualité qui intègre la pensée critique et l'expérience personnelle, en rejetant les conflits entre la raison et la foi souvent observés à son époque.

Les écrits théologiques de Castellion témoignent de son engagement envers la réflexion critique, la tolérance et la liberté intellectuelle. Sa remise en question de la prédestination calviniste et son approche moderne de la lecture biblique ont eu un impact durable, influençant les débats théologiques ultérieurs et contribuant à façonner un paysage religieux plus ouvert et inclusif.

Postérité de Sébastien Castellion

  • . Publication posthume des traités théologiques. Après la mort de Sébastien Castellion en 1563, ses traités théologiques ont été publiés à titre posthume grâce aux efforts des Remonstrants, une église réformée dissidente aux Pays-Bas. Ces traités comprenaient ses critiques de la doctrine de la prédestination de Calvin, ainsi que son œuvre majeure, "De l'art de douter et de croire, d'ignorer et d'avoir". La publication posthume a permis la préservation et la diffusion des idées novatrices de Castellion bien au-delà de sa vie, influençant les générations futures de théologiens et de penseurs.
  • . L'héritage chez les Protestants libéraux aux XIXe et XXe siècles. Les Protestants libéraux ont redécouvert et réévalué l'œuvre de Sébastien Castellion, le considérant comme une figure précurseure de leurs propres idées. Les thèmes de tolérance, de liberté de pensée et d'ouverture d'esprit défendus par Castellion résonnaient particulièrement avec les préoccupations des Protestants libéraux du XIXe et XXe siècles. Son plaidoyer en faveur de la liberté religieuse, son rejet de la violence au nom de la foi, et sa vision moderne de la foi ont été des points d'ancrage pour ceux qui cherchaient à harmoniser la foi chrétienne avec la pensée critique et les valeurs humanistes.
  • . Maintien de la mémoire de Sébastien Castellion en tant que défenseur de la liberté religieuse. La mémoire de Sébastien Castellion s'est perpétuée en tant que défenseur éminent de la liberté religieuse. Son opposition courageuse à la violence religieuse, ses critiques de la prédestination, et son plaidoyer pour une lecture biblique plus moderne ont continué d'inspirer ceux qui luttaient pour des formes plus inclusives de la foi et de la pratique religieuse. Des institutions et des penseurs progressistes ont régulièrement invoqué le nom de Castellion pour soutenir leurs arguments en faveur de la liberté de conscience et de la diversité religieuse.

Le maintien de la mémoire de Sébastien Castellion n'est pas seulement une reconnaissance de son héritage intellectuel, mais aussi une affirmation persistante de l'importance de la liberté religieuse dans la construction d'une société pluraliste et ouverte. Sa contribution à la réflexion théologique continue d'inspirer des discussions contemporaines sur les droits de l'homme, la tolérance religieuse et la coexistence pacifique entre différentes croyances.

Informations complémentaires

Publications

  • 1967, "Conseil à la France désolée", Genève: Droz
  • 1971, "De l’impunité des hérétiques", Genève: Droz
  • 1996, "De l’art de douter et de croire, d’ignorer et de savoir", Paris: La Cause
  • 1998, "Contre le libelle de Calvin", Genève: Éditions Zoé

Littérature secondaire

  • 1862, Ferdinand Buisson, "Sébastien Castellion, sa vie et son œuvre", Paris
  • 1914, Étienne Giran, "Sébastien Castellion et la Réforme calviniste. Les deux Réformes", Hachette, Paris
  • 2010, Ghislain Waterlot, "Aux sources de la pensée libérale, une généalogie de la tolérance. Castellion, Spinoza, Bayle, Locke", In: G. Kevorkian, dir., "La pensée libérale. Histoire et controverses", Paris, Ellipses, pp211-226