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Banque libre

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Une banque libre est une banque qui émet de la monnaie sans que cette création monétaire soit contrôlée par l'État. Une banque libre est une société commerciale ordinaire. Elle est régie par le droit commercial ordinaire, comme toute autre entreprise commerciale. Une telle banque ne bénéficie d'aucun privilège étatique. La monnaie émise par une banque libre est une monnaie privée.

Fonctionnement

Une banque libre publie un contrat de monnaie. Ce contrat de monnaie définit la monnaie privée émise par la banque libre. En particulier, le contrat de monnaie définit le valorimètre de la monnaie, c'est-à-dire la valeur de cette monnaie. La monnaie émise circule sur des supports monétaires.

Choix du valorimètre

Une banque doit choisir un valorimètre. Soit un métal précieux, soit une commodity, c'est-à-dire une matière première. Un valorimètre peut aussi être fondé sur un indice provenant d'un bureau d'experts. Un indice des prix peut fonder un valorimètre.

Banque de dépôt

Une banque de dépôt d'or remet au déposant un certificat garantissant que la banque conserve un dépôt d'or dans ses coffres. Un tel certificat peut servir de billet de banque, ou plus généralement de support monétaire. Une telle banque s'interdit d'émettre un certificat qui ne proviendrait pas d'un dépôt d'or.

La banque de dépôt a des coûts de garde du stock de l'or de la banque.

Banque avec réserves fractionnaires

Une telle banque émet plus de supports monétaires qu'elle ne possède d'or. Mais elle garantit qu'elle versera l'or à tout utilisateur d'un des supports monétaires émis. Une telle banque fait en sorte de posséder suffisamment d'actifs liquides, ou vendables rapidement, pour honorer son obligation de verser de l'or. Ces actifs de la banque peuvent être constitués d'or, ou de titres boursiers ou de reconnaissances de dettes.

Ainsi, mettons qu'une banque possède dix fois plus d'actifs boursiers que la monnaie émise et qu'elle ne possède pas d'or en échange des billets, ou d'un autre support monétaire. Elle promet qu'elle versera de l'or à tout utilisateur d'un support monétaire émis par elle. En vendant un de ses actifs, cette banque pourra facilement honorer son engagement. S'il existe un délai de remise de l'or, le contrat de monnaie stipule le montant de l'indemnité de retard que la banque versera au demandeur.

Paradoxe des intérêts manquants

Le paradoxe des intérêts manquants est le suivant : si une banque émet 100 au taux d'intérêt de 10%, l'emprunteur doit rembourser 110. Le montant des intérêts à verser est de 10. La question est de savoir comment l'emprunteur remboursera les 110 alors que la masse monétaire en circulation est de 100. Le paradoxe se résout comme tous les paradoxes, c'est-à-dire en remarquant une erreur dans l'énoncé. En effet, la banque n’émet pas seulement 100 (qu’elle confie à l’emprunteur), mais aussi 10, pour assurer ses propres dépenses. Ainsi, il existe 110 en circulation et non pas 100.

Ainsi, les 10 manquants circulent dans l'économie. L'emprunteur peut donc rembourser entièrement son prêt bancaire, y compris les intérêts.

Si l'emprunteur ne remboursait pas sa dette, la banque perdrait 110. Dans l'hypothèse d'une telle perte, les actifs de la banque diminueraient alors d'une valeur de 110.

Voir aussi Réfutation de l’argument des intérêts manquants.

Les débats sur les banques libres en France au XIXe siècle

Les origines du débat entre réserve fractionnaire et réserve à 100 %

Le débat sur les banques libres en France au XIXe siècle trouve ses origines dans les discussions concernant le système bancaire et la réglementation de la création monétaire. L'un des points centraux de ce débat était la question de la réserve, c'est-à-dire de savoir dans quelle mesure les banques devaient détenir des réserves métalliques en garantie de leurs émissions de billets de banque. Deux principales positions ont émergé : la réserve fractionnaire et la réserve à 100 %.

1. La réserve fractionnaire : Certains économistes, dont Charles Coquelin, étaient en faveur de la réserve fractionnaire. Selon cette approche, les banques n'étaient pas tenues de détenir 100 % de réserves métalliques correspondant à la totalité de leurs émissions de billets. Elles pouvaient émettre des billets au-delà de leurs réserves métalliques, tant que la confiance du public dans la stabilité de la banque était maintenue. Cela permettait une expansion plus flexible de la masse monétaire, mais cela comportait également des risques d'instabilité financière.

2. La réserve à 100 % : D'autres économistes, dont Jules Dupuit, étaient favorables à la réserve à 100 %. Selon cette approche, les banques devaient détenir des réserves métalliques équivalant à 100 % de leurs émissions de billets. Cette approche visait à garantir la stabilité du système bancaire en empêchant toute émission excessive de billets et en limitant les risques d'inflation. Cependant, elle pouvait entraîner une rigidité dans l'expansion de la masse monétaire.

Rôle de Charles Coquelin et de la Société d'économie politique dans le débat

Charles Coquelin a joué un rôle central dans la promotion de la réserve fractionnaire et la défense des idées de la banque libre en France. Il était un économiste influent de son époque et a contribué à la diffusion de ces idées à travers ses écrits, notamment son ouvrage majeur de 1848, "Du crédit et des banques". En tant que membre actif de la Société d'économie politique (SEP), Coquelin a participé aux réunions et aux débats au sein de cette société, contribuant ainsi à la diffusion de ces idées parmi ses pairs.

La Société d'économie politique, composée d'économistes français qui suivaient les enseignements de Jean-Baptiste Say, a servi de cadre pour ces discussions sur les banques libres. Les réunions de la SEP en novembre 1863, auxquelles a participé Jules Dupuit, ont été le théâtre de certaines des discussions sur les thèmes de la banque libre et du crédit.

Position de Jean-Baptiste Say

Les partisans de la libre banque prônaient la concurrence entre de multiples banques et la pleine liberté d'émission de billets pour chaque institution bancaire. Ces idées trouvent leurs racines dans les écrits de Jean-Baptiste Say, qui critiquait le monopole de la Banque de France et plaidait en faveur de la concurrence entre les banques émettrices. Say considérait que l'établissement de plusieurs banques émettrices de billets convertibles était plus bénéfique que l'investissement d'un seul organisme avec le privilège exclusif. Cela inciterait chaque banque à être plus accommodante et à offrir de meilleures garanties pour attirer la faveur du public.

Cependant, à l'instar de la Grande-Bretagne, Say ne pensait pas que l'on pouvait permettre à plusieurs banques émettrices de coexister sans risques importants. Il envisageait plutôt une solution intermédiaire où la Banque de France perdrait son privilège exclusif d'émission et serait soumise à la concurrence d'une ou deux banques émettrices. Parmi ces institutions concurrentes, celle qui se montrerait la plus utile en fournissant des liquidités au public serait récompensée par une plus grande circulation de ses billets de banque.

Citations

  • « Pourquoi le système de la « banque libre » n’a-t-il pas triomphé ? Si un tel système ne s’est pas imposé, c’est parce que les États se sont emparés du contrôle de l’émission monétaire afin de financer leur déficit public à une époque où le marché n’était pas suffisamment développé pour assurer cette activité. » (Nathalie Janson)
  • « L'idée – si largement répandue aujourd'hui – selon laquelle les banques libres seraient et ont été très instables, n'était même jamais venue à l'esprit de ses opposants au début du dix-neuvième siècle en France. Si les adversaires de la banque libre reconnaissaient sa prospérité, sa solvabilité, et sa stabilité, alors pourquoi ce système a-t-il été détruit ? » (Philippe Nataf, La libre concurrence bancaire en France (1796-1803))
  • « Si nous voulons la survie de la libre entreprise et de l’économie de marché (ce que même les partisans d’une “économie mixte” semblent eux aussi souhaiter), nous n’avons pas le choix : il faut remplacer le monopole actuel des hommes de l’Etat sur la production de monnaie par la libre concurrence entre des banques d’émission privées. Nous n’avons jamais eu de monnaie dont les responsables auraient eu pour seul et exclusif souci de donner au public la monnaie qu’il préfère à d’autres, leurs moyens d’existence mêmes dépendant de la satisfaction des attentes ainsi créées. Ce que nous devons organiser aujourd’hui, c’est un Mouvement pour la Banque Libre à l’image du mouvement pour le libre-échange du 19e siècle, qui ferait connaître non seulement les dégâts causés par une forte inflation, dont on peut soutenir que les institutions actuelles permettraient de l’éviter, mais aussi l’effet inévitable et plus grave des systèmes existants, qui est de multiplier les périodes de récession. » (Friedrich Hayek, Denationalization of Money : The Argument Refined, 1978)

Bibliographie

  • 2007, Jean-Paul Domin, "La question du monopole d'émission de la monnaie: le débat banque centrale contre banque libre chez les économistes français (1860-1875)", Revue européenne des sciences sociales, Vol 45, n°137, pp185-202

Voir aussi

Liens externes


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