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Multiplicateur keynésien

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Le multiplicateur keynésien ou multiplicateur d'investissement est une théorie développée par John Maynard Keynes s'inspirant du multiplicateur de l'emploi de l'économiste anglais Richard Kahn dans un article intitulé « La relation entre l'Investissement Intérieur et le Chômage ». L'idée est la suivante : si la propension à consommer dans les diverses circonstances imaginables (ainsi que quelques autres conditions) est prise comme donnée et si l'on suppose que l'autorité monétaire ou une autre autorité publique prenne des mesures en vue de favoriser ou de contrarier l'investissement, la variation du volume de l'emploi sera une fonction de la variation nette du montant de l'investissement.

Les keynésiens le définissent comme le rapport entre une variation des dépenses publiques et la variation consécutive du revenu global. C'est l'un des soubassements idéologiques des politiques de relance financés par l'emprunt.

Un concept faux

Plan de relance Barack Obama.jpg

La théorie du "multiplicateur d'investissement" peut se présenter comme suit [1] :

Revenu de la société = Consommation + Investissement

La consommation est une fonction stable du revenu, comme le montrent des corrélations statistiques, etc. Disons, pour simplifier, que la variable "Consommation" est toujours égale à 0,8 fois le "Revenu (de la société)". Dans ce cas on obtient à partir de l'équation précédente :

Revenu = 0,8 Revenu + Investissement ; donc 0,2 Revenu = Investissement ;

ou encore

Revenu = 5 Investissement

Ce "5"-là est le "multiplicateur d'investissement". Il est alors évident que pour augmenter le revenu monétaire de la société d'un montant donné, il sufit d'augmenter l'investissement du cinquième de ce montant ; la magie du multiplicateur fera le reste.

Il a été démontré qu'il s'agit d'un sophisme mathématique. En effet, peu importe d'où vient l'argent, par voie d'emprunt, de la fiscalité ou de la planche à billets, les dépenses du gouvernement préemptent toujours les dépenses qui se feraient tôt ou tard dans l'économie puisqu'il s'agit d'un transfert. Voir aussi la loi de Bitur-Camember.

Si l'investissement a en effet un multiplicateur apparent, il est erroné de croire qu'encourager l'investissement public permettra d'avoir des effets positifs.

Effet d'éviction

Searchtool-80%.png Article connexe : Effet d'éviction.

Dans un article de 1974, "Ricardian Equivalence Hypothesis", le macro-économiste Robert Barro a montré que le multiplicateur keynésien ne pouvait pas avoir les vertus que lui prêtent les tenants de Keynes. Financer un plan de relance par de la dette ou des impôts publics ne change rien : la dette est un impôt futur et les ménages épargnent davantage pour se prémunir de ces hausses d'impôts futures, au détriment de la consommation. Le multiplicateur est, au mieux, unitaire.

La question a suscité de nombreux débats et études depuis 1974. Une étude de Matthew Shapiro et Joel Slemrod a montré qu'en 2001, les baisses d'impôts temporaires du gouvernement américain avaient été très largement utilisées pour épargner en prévision de la hausse des impôts future[2].

Il serait cependant faux de dire que personne ne gagne dans ces cas-là : la dette n'étant remboursée que plus tard, ceux qui meurent avant ce remboursement ont eu les bénéfices sans les coûts. C'est ce qui fait dire à l'économiste Tim Harford qu'un plan de relance n'est rien d'autre qu'une « taxe sur les adolescents »[2].

Importations

Dans les économies ouvertes, ce mécanisme est rendu encore plus inefficace par les importations : bien souvent les politiques de relance ne servent qu'à financer l'achat de biens importés et donc à soutenir les économies étrangères tout en creusant la dette publique. Ce fut par exemple ce qu'il advint avec la politique de relance socialiste en France au début des années 1980, pendant que les autres pays développés se réformaient.

Stabilité du multiplicateur

Enfin, Milton Friedman et David Meiselman ont montré, dans leur article The Relative Stability of Monetary Velocity and the Investment Multiplier in the United States, 1897-1958, que si ce multiplicateur existait réellement, sa valeur serait beaucoup plus instable et sujette à variations que celle de la vitesse de la circulation de la monnaie, ruinant ainsi tout espoir de bâtir des plans de relance sur autre chose que des chiffres arbitraires.

Citations

  • « L'idée théorique centrale de Mr. Keynes à propos de la relation entre la propension à consommer et le multiplicateur, qui est destiné à donner forme et une force à ces observations, s'avère ne pas être un constat empirique à propos du monde réel, mais une relation algébrique stérile qu'aucun fait ne peut prouver où réfuter. » (Gottfried Haberler, Mr. Keynes' theory of the “multiplier”, Journal of Economics, 7(3), 299-305, 1936)
  • « Un voleur qui justifierait son vol en expliquant comment il a réellement aidé ses victimes et comment ses dépenses ont stimulé le commerce ne convaincrait personne ; mais quand sa théorie revêt l'apparence d'équations keynésiennes et de références édifiantes à "l’effet multiplicateur", elle emporte davantage la conviction, malheureusement. » (Murray Rothbard)
  • « La logique du multiplicateur est fallacieuse. Essayer de s'enrichir en augmentant la consommation, c'est confondre la cause et l'effet de la croissance. Le problème d'une dépression ne vient pas d'une mythique déficience de la demande globale. » (Louis Rouanet[3])

Notes et références

  1. Le multiplicateur keynésien exemple extrait du chapitre 11 de "Man, Economy, and State"
  2. 2,0 et 2,1 Tim Harford, "Why a tax cut just isn’t fair on teenagers", Financial Times, 31 mai 2008, [lire en ligne]
  3. La faillite de la Grèce pour les nuls (3), Louis Rouanet

Annexes

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes


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