Vous pouvez contribuer simplement à Wikibéral. Pour cela, demandez un compte à adminwiki@liberaux.org. N'hésitez pas !


Pierre Kropotkine

De Wikiberal
(Redirigé depuis Piotr Kropotkin)
Aller à la navigation Aller à la recherche

Pierre Kropotkine, de son nom complet Pyotr Alexeyevich Kropotkine, était un anarchiste et géographe russe, connu comme un défenseur du communisme libertaire. Né le 9 décembre 1842 à Moscou, dans l'Empire russe, il est décédé le 8 février 1921 à Dmitrov, en URSS. Il repose au cimetière de Novodevichy à Moscou.

Contexte historique et biographique

La période à laquelle Pierre Kropotkine a vécu était marquée par de profonds bouleversements sociaux et politiques. Né dans une famille aristocratique propriétaire terrienne, il a bénéficié d'une éducation privilégiée et a été exposé aux inégalités et aux injustices de la société russe de l'époque.

Kropotkine a suivi une formation militaire et a servi en tant qu'officier en Sibérie, où il a participé à plusieurs expéditions géologiques. Cependant, son expérience sur le terrain a renforcé ses convictions en faveur de l'égalité et de la justice sociale, le poussant à remettre en question les structures de pouvoir existantes.

En raison de son activisme politique, Kropotkine a été emprisonné en 1874. Mais il a réussi à s'évader deux ans plus tard et a été contraint de s'exiler. Pendant 41 ans, il a vécu en Suisse, en France (où il a été emprisonné pendant près de quatre ans) et en Angleterre. Durant son exil, il a donné des conférences et a publié de nombreux écrits sur l'anarchisme et la géographie.

Après la révolution russe de 1917, Kropotkine est retourné en Russie, mais il a été déçu par l'état bolchevique qui a émergé. Malgré cela, son influence sur le mouvement anarchiste et sa contribution à la philosophie politique restent significatives.

Critique du gouvernement représentatif

  • . Examen des limites et des défauts du parlementarisme comme système de gouvernement. Kropotkine était connu pour sa critique des systèmes politiques basés sur la représentation par des élus. Il soulignait souvent les limites et les défauts du parlementarisme, notamment en ce qui concerne la distance entre les gouvernants et les gouvernés, la bureaucratisation excessive et la concentration du pouvoir entre les mains d'une élite politique restreinte.
1. Tout d'abord, la démocratie parlementaire crée une distance entre les gouvernants et les gouvernés, ce qui peut entraîner une perte de connexion entre les décideurs politiques et les besoins réels de la population. Les élus peuvent être davantage préoccupés par la préservation de leur pouvoir et de leurs intérêts politiques que par la véritable représentation des besoins de leurs électeurs.
2. De plus, le parlementarisme peut conduire à une bureaucratisation excessive et à une lenteur dans le processus décisionnel. Les débats interminables au sein des assemblées législatives et l'obligation de suivre des protocoles rigides peuvent rendre difficile l'adoption rapide de mesures nécessaires en réponse aux problèmes urgents de la société.
3. Enfin, le parlementarisme est souvent critiqué pour favoriser la concentration du pouvoir entre les mains d'une élite politique restreinte, au détriment de la participation démocratique réelle des citoyens. Les partis politiques dominants peuvent exercer un contrôle excessif sur le processus politique, limitant ainsi la diversité des opinions et des solutions proposées.
  • . Dénonciation de l'absurdité de confier la prise de décision à des majorités ignorant les domaines sur lesquels elles légifèrent. Kropotkine remettait en question le concept de gouvernance par la majorité, soulignant les risques d'oppression des minorités et les défauts d'un système où les décisions sont prises par des individus mal informés ou influencés par des intérêts particuliers. Il prônait plutôt une approche de gouvernance basée sur le libre accord et la coopération volontaire. Confier la prise de décision à une majorité peut sembler démocratique en théorie, mais cela pose un problème lorsque cette majorité n'a pas nécessairement une connaissance approfondie des sujets sur lesquels elle légifère. En réalité, les électeurs qui composent la majorité peuvent être mal informés, influencés par des préjugés ou des intérêts particuliers, et donc prendre des décisions qui ne servent pas l'intérêt général. De plus, les décisions prises par une majorité peuvent souvent être oppressives ou discriminatoires pour les minorités, compromettant ainsi les principes fondamentaux de justice et d'égalité.
  • . Illustration des alternatives fondées sur le libre accord et la coopération volontaire. Kropotkine était un défenseur fervent des formes d'organisation sociale basées sur le libre accord et la coopération volontaire. Les exemples tels que l'Union Postale Internationale et les associations professionnelles correspondent à sa vision d'une société où les individus et les groupes collaborent pour parvenir à des accords mutuellement bénéfiques, sans recourir à une autorité coercitive ou à des processus politiques centralisés. Ces organisations démontrent qu'il est possible de parvenir à des accords et à des solutions mutuellement bénéfiques sans recourir à une autorité coercitive ou à des processus politiques centralisés. Au lieu de cela, elles reposent sur des principes de liberté individuelle, d'autonomie locale et de participation démocratique directe, ce qui permet une plus grande efficacité et une meilleure adaptation aux besoins réels des membres de la société.

Vers une société sans État

  • . Plaidoyer en faveur d'une organisation sociale basée sur des groupes libres et des fédérations de groupes. Kropotkine propose une vision d'une société éliminant la nécessité d'un gouvernement centralisé. Selon lui, les individus et les communautés peuvent s'auto-organiser en formant des associations volontaires basées sur des intérêts communs et des objectifs partagés. Cette approche permet une plus grande flexibilité et une meilleure adaptation aux besoins locaux, contrairement aux structures rigides et hiérarchiques des gouvernements centralisés. Les groupes libres, selon Kropotkine, fonctionnent sur des principes de coopération et de solidarité, plutôt que sur la compétition et la coercition. Chaque groupe est autonome et peut se fédérer avec d'autres groupes pour atteindre des objectifs communs, tout en conservant son indépendance. Cette fédération de groupes permet de créer un réseau décentralisé de collaboration, où les décisions sont prises collectivement par ceux qui sont directement concernés, plutôt que par des représentants éloignés des réalités locales.
  • . Décentralisation des décisions. Kropotkine prône des méthodes de prise de décision décentralisées et démocratiques, où les délégués ne sont pas élus pour imposer des lois, mais sont mandatés pour négocier des accords au nom de leurs groupes. Ces délégués sont choisis pour leur expertise et leur connaissance des questions spécifiques sur lesquelles ils travaillent, et leur mandat est strictement limité aux tâches qui leur sont confiées. Les décisions sont prises par consensus ou par des processus démocratiques directs au sein de chaque groupe, et les délégués sont tenus de retourner à leur groupe avec des propositions d'accord, qui doivent être ratifiées par les membres du groupe avant d'être mises en œuvre. Ce modèle de prise de décision assure que le pouvoir reste entre les mains des individus et des communautés, évitant ainsi les abus de pouvoir et les dérives bureaucratiques.
  • . Une nouvelle organisation sociale en harmonie avec la nouvelle phase économique. Kropotkine affirme que chaque phase économique de l'histoire est accompagnée d'un mode de vie politique correspondant. Par exemple, la société féodale était associée à la monarchie absolue, tandis que l'ère industrielle a vu l'émergence du parlementarisme. Avec les transformations économiques actuelles, marquées par l'essor de la technologie et la mondialisation, Kropotkine soutient que l'organisation sociale doit également évoluer. Il propose de repenser l'organisation sociale pour qu'elle soit en harmonie avec la nouvelle phase économique, caractérisée par une production décentralisée et une interconnexion globale. Cela implique d'abandonner les structures étatiques centralisées au profit de réseaux flexibles de groupes autonomes, capables de répondre rapidement aux changements économiques et sociaux.

En somme, Pierre Kropotkine envisage une société où la liberté individuelle et la coopération volontaire sont les principes fondamentaux, permettant aux communautés de s'organiser de manière décentralisée et démocratique. Cela, selon lui, constitue non seulement une réponse aux défis économiques contemporains, mais aussi une réalisation de l'idéal de justice et d'égalité pour tous les membres de la société.

La tendance éminemment communautaire des sociétés individualistes

Pierre Kropotkine, dans ses écrits sur l'anarchisme et le communisme, met en lumière une contradiction apparente au sein des sociétés contemporaines : malgré une organisation ostensiblement individualiste et capitaliste, il existe une tendance sous-jacente et croissante vers des pratiques communautaires. Kropotkine observe que ces tendances, bien qu'émergentes et parfois occultées par les structures de pouvoir établies, témoignent d'un mouvement vers une société basée sur l'entraide et la solidarité.

  • . Exemples historiques et contemporains de pratiques communautaires. Kropotkine identifie des exemples historiques et contemporains où les sociétés, même celles fortement influencées par l'individualisme capitaliste, manifestent des pratiques communautaires. Il cite notamment :
1. Les structures municipales médiévales. Les villes médiévales d'Europe ont souvent fonctionné sur des principes communautaires, où les ressources et les bénéfices étaient partagés collectivement. Les guildes, les communes et les marchés locaux étaient régis par des règles de solidarité et d'entraide.
2. Les biens publics modernes. Dans les sociétés contemporaines, il existe de nombreux exemples de biens et de services publics qui sont accessibles à tous sans discrimination. Les ponts, les routes, les parcs, les bibliothèques publiques et les musées illustrent comment la société moderne continue de fournir des ressources sur la base de besoins plutôt que sur la capacité de payer.
3. Les systèmes de transport et de communication. Kropotkine mentionne des innovations comme les tickets de transport mensuels et les zones tarifaires, qui permettent une utilisation flexible et étendue des services de transport sans une tarification rigide basée sur l'utilisation exacte. De même, le service postal universel, avec son tarif uniforme, montre une tendance à simplifier l'accès aux services pour tous.
  • . L'émergence des services communautaires dans des sociétés individualistes. Kropotkine observe que même dans les sociétés individualistes, où l'accent est mis sur la propriété privée et le profit personnel, des tendances communautaires continuent à émerger. Cette émergence est souvent motivée par l'efficacité et le bien-être collectif, prouvant que des structures de coopération peuvent prospérer même dans un environnement capitaliste.
1. Les bibliothèques et les écoles publiques. Les bibliothèques publiques et les écoles gratuites sont des institutions qui fonctionnent selon le principe de l'accès universel. Elles ne demandent pas de justification de contribution sociale avant de fournir leurs services, incarnant ainsi le principe "de chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins".
2. Les services sociaux. Les initiatives telles que les repas gratuits pour les enfants, les soins de santé de base et les aides sociales démontrent un engagement vers le soutien communautaire. Ces services visent à assurer que les besoins fondamentaux des individus sont satisfaits, indépendamment de leur situation économique.

Cependant, Pierre Kropotkine oublie d'accentuer que ces services pourraient être fournis également par des agents privés.

  • . La nécessité de l'entraide dans les sociétés modernes. Kropotkine argumente que, malgré l'influence du capitalisme et de l'individualisme, les sociétés ne peuvent fonctionner efficacement sans une dose significative de pratiques communautaires. L'entraide et la coopération sont nécessaires non seulement pour le bien-être individuel mais aussi pour la stabilité et la prospérité de la société dans son ensemble.
1. La réponse aux crises. Les catastrophes naturelles ou les situations d'urgence montrent clairement la tendance des communautés à s'organiser et à s'entraider. Lors des crises, la priorité est souvent donnée aux plus vulnérables, tels que les enfants et les personnes âgées, illustrant une inclination naturelle vers la solidarité.
2. Les organisations volontaires. Les sociétés regorgent d'exemples d'organisations volontaires et de coopératives qui travaillent sur des bases non lucratives pour le bien commun. Ces organisations prouvent que les individus peuvent et choisissent de travailler ensemble pour des objectifs communs sans coercition étatique.

Pierre Kropotkine, à travers ses observations et ses analyses, démontre que même dans des sociétés structurées autour de l'individualisme et du capitalisme, des tendances communautaires persistent et se développent. Ces pratiques et ces structures montrent que l'entraide et la coopération sont des éléments fondamentaux de la vie sociale, essentiels à la survie et au développement des communautés. En reconnaissant et en renforçant ces tendances, Kropotkine propose une vision de société où la liberté individuelle et la solidarité collective ne sont pas en contradiction, mais se complètent et se renforcent mutuellement.

Publications

  • 1899, "Memoirs of a Revolutionist", Boston: Houghton Mifflin
  • 1905, "Ideals and Realities in Russian Literature", New York: McClure, Philips
  • 1906, "The Conquest of Bread", New York, NY: G. Putnam and Sons
  • 1915, "Mutual Aid: A Factor of Evolution", London: William Heinemann
    • Nouvelle édition en 1955, "Mutual Aid: A Factor of Evolution", Boston: Extending Horizons Books-Porter Sargent
  • 1971, "The Commune of Paris", In: Nicolas Walter, dir., "Freedom Pamphlet", n°8, London

Littérature secondaire

  • 1950, Ivan Avakumovic, George Woodcock, "The Anarchist Prince: A Biographical Study of Peter Kropotkin", New York: Boardman
  • 1970, Roger N. Baldwin, dir., "Kropotkin’s Revolutionary Pamphlets", New York: Dover
  • 1975, Colin Ward, dir., "Peter Kropotkin. 'Fields, Factories and Workshops'", Tomorrow Freedom Press
  • 1988,
    • Paul Avrich, "Kropotkin's Ethical Anarchism", In: Paul Avrich, "Anarchist Portraits", Princeton: Princeton University Press, pp53-78
    • Paul Avrich, "Kropotkin in America", In: Paul Avrich, "Anarchist Portraits", Princeton: Princeton University Press, pp79-106