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Benjamin A. Rogge
| Benjamin A. Rogge | |||||
| Économiste | |||||
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| Dates | 1920-1980 | ||||
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| Articles internes | Autres articles sur Benjamin A. Rogge | ||||
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| Interwikis sur Benjamin A. Rogge | |||||
Benjamin A. Rogge, né le 18 juin 1920 et mort le 17 novembre 1980, est un économiste américain, professeur d'économie politique à l'université de Wabash, à Crawfordsville, dans l'Indiana (USA), où il fut nommé doyen de 1956 à 1964.
Biographie
Benjamin Rogge a obtenu ses diplômes à l'université de Hastings (A.B.) en 1940, à l'université du Nébraska (M.A.), et à l'université Northwestern (Ph.D.). Il était membre de l'Association économique américaine et de la Société du Mont-Pèlerin. Il a été particulièrement influencé par l'économiste autrichien Friedrich Hayek.
Dans son livre, Can capitalism survive ? (1979), il reprend les idées exprimées par Joseph Schumpeter dans Capitalisme, socialisme et démocratie (1942), des dangers de voir disparaître le capitalisme, du fait même que son succès mobilise moins ses supporters que ses adversaires :
« En effet, si le capitalisme doit survivre, il doit se défendre dans l'arène des valeurs et des émotions, et, de là, de son succès même, alors que dans le même temps, un système économique réduit ses possibilités de victoire. »
— Benjamin A. Rogge, Can capitalism survive ?
L'éducation dans un système de marché libre
Benjamin Rogge et Pierre Goodrich défendent une approche de l'éducation basée sur l'entreprise libre dans leur essai écrit en 1973, affirmant que les arrangements éducatifs sont inefficaces, inéquitables et contraires aux droits de l'homme et à la nature humaine. Ils proposent une vision de l'enseignement supérieur qui comprend la sélection des enseignants en fonction de leur potentiel pédagogique, la rémunération des enseignants en fonction de leur efficacité à servir les objectifs de l'université, la prise de décision par le conseil d'administration et les administrateurs, l'élimination des tests et des notes (sauf ceux demandés volontairement par les étudiants) et le financement par des fonds privés, de préférence avec l'université fonctionnant comme une entreprise profitable.
Thomas Johnson[1], dans le commentaire qu'il a réalisé dans la revue The Freeman, en 1974, suggère que même la perspective de Benjamin Rogge et Pierre Goodrich ne va pas assez loin pour envisager une société vraiment libre, où l'éducation serait entièrement dictée par le marché. Dans cette vision, les entreprises d'éducation proposeraient des cours à tout client payant, quel que soit son âge, et les demandes du marché détermineraient ce qui est enseigné, comment cela est enseigné et à qui cela est enseigné. Il soutient que dans un cadre commercial, avec une liberté de choix totale, un développement mental approprié peut avoir lieu.
Anthropologie d’une liberté responsable
Dans The Freeman en 1969, Benjamin Rogge affirme[2] que le libertarianisme n’est pas une utopie mais la défense d’un cadre minimal où chacun, imparfait, assume librement et pacifiquement les conséquences de ses choix.
- Thèse directrice. « Le libertarien n'est en aucun cas un utopiste ». Par cette formule inaugurale, Benjamin Rogge cherche d’abord à lever un malentendu. Le libertarien n’est pas celui qui promet l’avènement d’une société parfaite, débarrassée des erreurs et des conflits. Il ne projette pas un modèle idéalisé à imposer au réel. Sa démarche est plus sobre et plus exigeante à la fois : il décrit les conditions minimales pour que l’homme puisse vivre en accord avec ce qu’il est, c’est-à-dire un être imparfait mais responsable, capable de dignité autant que de tragédie et de comédie. Autrement dit, loin d’une utopie de perfection, le libertarianisme selon Rogge esquisse une anthropologie de l’humanité vécue.
- La condition humaine : l’imperfection assumée. Rogge insiste sur une donnée première : « chaque individu imparfait » appelé à prendre « ses propres décisions imparfaites ». Loin d’imaginer un homme rationnel et infaillible, il part du constat de la faillibilité constitutive de la condition humaine. C’est précisément parce que nos choix sont incertains et nos jugements limités que toute tentative d’ingénierie sociale visant à effacer l’erreur ou à planifier la perfection se condamne à l’échec. La conséquence est claire : mieux vaut des règles simples, générales et stables, qui laissent place à l’initiative et à la correction par l’expérience, plutôt que des dispositifs complexes prétendant corriger d’avance ce que nul ne peut prévoir.
- Champ d’action : liberté sous contrainte de paix. « laissé libre d'agir… en toute circonstance de manière pacifique » : la formule fixe le cadre normatif du libertarianisme roggeien. La liberté s’exerce sous l’exigence de non-agression : chacun peut poursuivre ses fins, expérimenter, se tromper et recommencer, tant que ses actes n’imposent ni violence ni fraude à autrui. Ce horizon pacifique autorise un pluralisme des buts et une multiplication des essais, tandis que les inévitables désaccords sont tranchés par des procédures non violentes (contrat, arbitrage, droit privé) plutôt que par la contrainte.
- Imputabilité : récompenses et douleurs comme pédagogie de la liberté. Rogge souligne que la liberté n’a de sens que si chacun peut « savourer les fruits de ses succès » et « souffrir l'agonie de ses erreurs ». La responsabilité suit ici une chaîne claire (choix, actes, conséquences) qui ne doit pas être brouillée par des mécanismes collectifs d’effacement. C’est de cette clarté que naît la valeur formatrice de l’expérience : apprendre par essais et erreurs, mesurer la portée de ses décisions, rendre compte de ses engagements. L’imputabilité devient ainsi la véritable pédagogie de la liberté.
- Finalité humaine : dignité, tragédie, comédie. Rogge affirme que l’homme libre peut « atteindre la dignité, la tragédie et la comédie » de l’existence. La liberté permet d’accéder à la plénitude de la vie humaine dans toutes ses dimensions : la dignité d’assumer ses choix, la tragédie des épreuves et des erreurs, la comédie des détours, des hasards et des joies. Elle ne supprime pas la souffrance ni l’incertitude, mais elle les inscrit dans une expérience intelligible, vécue comme celle d’un sujet et non d’un objet. C’est dans cette tension entre grandeur, coût existentiel et légèreté que se déploie la condition proprement humaine.
- Antinomie : « être un homme » vs « être une chose ». La formule de Rogge culmine dans l’opposition entre « être un homme plutôt qu'une chose ». Tout se joue dans ce contraste : être un homme, c’est conserver son jugement propre et rester l’auteur de ses actes ; être une chose, c’est voir cette imputabilité dissoute, devenir simple rouage d’un système ou objet d’une utopie qui prétend penser et agir à sa place. La perte du lien entre décision et responsabilité entraîne une véritable réification : l’homme n’est plus sujet, mais matière administrée. Rogge rappelle ainsi que la dignité humaine dépend avant tout de la possibilité de répondre de soi.
- . Traduction institutionnelle (implicite dans la citation). Si Rogge n’explicite pas dans sa formule les instruments politiques, son propos en suggère l’armature. Pour que la responsabilité reste visible et opérante, il faut des institutions qui rendent l’imputabilité lisible. Les droits de propriété assurent la traçabilité des moyens engagés et des effets produits. L’État de droit garantit que les torts soient réglés pacifiquement et que les contrats soient exécutés. Enfin, les libertés civiles (parler, s’associer, échanger) ouvrent l’espace où les individus peuvent expérimenter sans recourir à la coercition. Ensemble, ces dispositifs donnent corps à la liberté responsable que Rogge érige en condition d’une existence pleinement humaine.
La phrase de Benjamin Rogge tient en peu de mots une vision complète du libéralisme : une anthropologie (l’imperfection gouvernée par le jugement), une éthique (la liberté comme imputabilité pacifique des actes) et une téléologie modeste (vivre la dignité, accepter la tragédie, goûter la comédie de l’existence). En somme, être libre pour répondre de ses actes, telle est la condition pour demeurer un être humain et non une chose.
Informations complémentaires
Notes et références
- ↑ Thomas Johnson, 1974, Commentaire du livre dirigé par Anne Husted Burleigh, Education in a free society, The Freeman, Vol 24, n¨2, February, pp126-127
- ↑ Le libertarien n'est en aucun cas un utopiste. Il soutient seulement que, dans un monde où chaque individu imparfait serait libre de prendre ses propres décisions imparfaites et d'agir en toute circonstance de manière pacifique, en savourant les fruits de ses succès et en subissant l'agonie de ses erreurs, l'homme pourrait au moins pleinement atteindre la dignité, la tragédie et la comédie qui accompagnent le fait d'être un homme plutôt qu'une chose. — Benjamin Rogge, "The Libertarian Philosophy", The Freeman, octobre, Vol 19, n°10
Publications
- Pour une liste détaillée des œuvres de Benjamin Rogge, voir Benjamin Rogge (bibliographie)
Littérature secondaire
- 1955, William Curtiss, "Minus the Jargon", commentaire du livre de John Van Sickle et Benjamin Rogge, "Introduction to Economics", The Freeman, January, Vol 5, n°1, pp277-278
- 1980,
- Richard M. Pfeffer, commentaire du livre de Benjamin A. Rogge, "Can Capitalism Survive?", The Annals of the American Academy of Political and Social Science., vol 449, pp212-220
- Robert F. Hébert, commentaire du livre de Benjamin A. Rogge, "Can Capitalism Survive?", Southern Economic Journal, April, Vol 46, n°4, pp1263-1264
- 1981, John D. Stewart, "Propping Up Capitalism", Commentaire du livre de Benjamin A. Rogge, "Can Capitalism Survive?", Libertarian review, janvier, pp40-41
- 2010, Dwight R. Lee, "A Maverick’s Defense of Freedom. Selected Writings and Speeches of Benjamin A. Rogge", Indianapolis: Liberty Fund
Voir aussi
Liens externes
- (en)Benjamin Rogge in 1973 Discussed Leapfrog Competition
- (en)Will Capitalism Be A Victim of Its Own Success?
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