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Comptabilité

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Luca Pacioli, inventeur de la comptabilité en partie double

En économie, la comptabilité est une discipline pratique consistant à gérer des données chiffrées permettant de refléter et de qualifier, pour un agent ou une entité, aussi bien l'ampleur de son activité économique que ses conséquences sur l'inventaire de son patrimoine :

  • la comptabilité d'entreprise recense des informations sur l'activité économique d'une entreprise ainsi que sur les éléments de son patrimoine ;
  • la comptabilité nationale est une représentation schématique et quantifiée de l'activité économique d'un pays ;
  • la comptabilité publique est le nom de la comptabilité que tiennent les administrations et les collectivités publiques d'un pays pour enregistrer leurs recettes et leurs dépenses.

Histoire de la comptabilité

Le besoin de compter, d'inventorier, etc. est quasiment aussi vieux que l'humanité et ce sont des documents qu'on peut qualifier de proto-comptabilité qui constituent les premières traces écrites qui nous soient parvenues. A Sumer, ce sont des traces d'inventaires comptables sur des tablettes qui nous sont parvenues comme premiers témoins de l'écriture. C'est grâce à l'essor du commerce que la comptabilité se développe, afin de tenir trace des différents mouvements d'achat et de revente.

Le développement pratique de la comptabilité se poursuit et accélère avec les marchands italiens à la fin du Moyen-Âge et à la Renaissance, grâce à l'invention de l'imprimerie par Johannes Gutenberg et la généralisation du papier. La comptabilité moderne, ou comptabilité en partie double, est finalement codifiée par le moine italien Luca Pacioli à la fin du XVe siècle. Il met en forme les pratiques qui existent déjà alors chez les grands marchands italiens, présentant la comptabilité en partie double comme la « méthode vénitienne ».

L'importance de la comptabilité pour le capitalisme a ensuite été soulignée par des auteurs comme Werner Sombart, Max Weber et Ludwig von Mises. Son histoire fait l'objet de nombreuses recherches approfondies et de débats animés. La théorisation de la comptabilité à double entrée, initiée par Luca Pacioli[1], sa persévérance dans le temps et ses évolutions raffinées, indiquent que cette pratique est devenue une institution.

Ce sont des organismes privés (International Accounting Standards Committee à partir de 1973) qui ont ces dernieres décennies pris les devants pour une certaine uniformisation des standards comptables au delà des différents standards nationaux qui sont largement des standards fiscaux plus que comptables, poussés essentiellement par conformité avec la fiscalité locale plus qu'avec la description fidèle d'une réalité économique.

Sophismes comptables pour justifier les actions de l'État

Une série de sophismes impliquant plus ou moins directement la comptabilité permettent de justifier les actions de l’État.

L'illusion comptable, elle-même liée au sophisme comptable[2], consiste à confondre valeur et dépense : « Toute dépense faite par l'État est efficace car elle créé de la valeur » ; on affirme que la dépense est égale à la valeur de ce qu'elle a payé, cette illusion est un refus de tout raisonnement économique. Le sophisme comptable consiste ainsi à évaluer l'utilité de l'État et l'importance du « service public » et des biens publics qu'il produit uniquement à partir du montant d'impôts prélevés, un peu comme si l'impôt perçu par l’État équivalait au chiffre d'affaires d'une entreprise (alors qu'il en est radicalement différent, puisque obtenu sous la contrainte). Le sophisme comptable est une forme de sophisme matérialiste puisqu'il se limite à mesurer des montants sans évaluer le service rendu ni l'opinion que les personnes s'en font.

Au sophisme comptable, Georges Lane et François Guillaumat ajoutent également :

  • le sophisme anti-comptable, qui consiste à violer les règles de la comptabilité, soit en ne tenant pas compte de ce qu’on aurait pu faire d’autre avec la richesse volée (la vitre cassée de Frédéric Bastiat[3]), soit en violant les lois de l’arithmétique (Keynes et le multiplicateur keynésien, les plans de relance par la dépense ; « le meilleur moyen de s'enrichir est de s'endetter », la comptabilité de la SNCF française, qui comptabilise les subventions étatiques dans son chiffre d'affaires, et prétend ainsi dégager des bénéfices) ; voir aussi la loi de Bitur-Camember ;
  • le sophisme pseudo-comptable, qui consiste à appliquer les règles de la comptabilité (et donc à pratiquer le calcul économique) là où elles n'ont pas de sens : quand les prix ne sont pas établis par un libre marché[4], voire quand il n'y a pas de prix du tout (illusion de la gratuité).

Le sophisme comptable devient une escroquerie pure et simple quand on ment sur les chiffres, avec l'accord de la législation. Ainsi, certaines institutions, dans certains pays, peuvent évaluer leurs actifs financiers non pas selon leur valeur de marché (ou « juste valeur », fair value, mark to market) mais selon leur valeur d'achat (valorisation au coût historique), ce qui leur fournit un moyen très commode de masquer leurs pertes (on parle d'entreprises "zombies").

Citations

  • « Quand on cesse de compter, c'est la peine des hommes que l'on cesse de compter. » (Charles Bettelheim[5], économiste marxiste)
  • « La comptabilité donne de l’information sur ce qui s’est passé, mais ne peut en aucune façon prédire ce qui arrivera. Quand une personne fait un choix, [elle] a toujours, et à jamais à choisir entre de multiples futurs. [..] C’est pourquoi la morale et l’économie (et en fait, l’économie est la même chose que la moralité) n’est jamais concernée par les coûts comptables, mais plutôt, elle est toujours concernée par les coûts d’opportunité, c’est-à-dire, la différence attendue de résultat entre les diverses opportunités. Les coûts comptables sont non pertinents ; les seules personnes qui se soucient jamais des coûts comptables sont les fonctionnaires du fisc — autrement dit, les voleurs. » (Faré[6])
  • « La comptabilité en partie double est l'une des plus belles inventions de l'esprit humain. » (Goethe[7])

Notes et références

  1. Raymond de Roover, 1956, "The development of accounting prior to Luca Pacioli according to the account books of medieval merchants", Studies in the History of Accounting, pp114-174
  2. Voir à ce sujet Raisonnement économique contre sophismes comptables, François-René Rideau
  3. Par exemple, on comparera les frais des organismes de sécurité sociale avec ceux des assurances privées, pour en conclure que les uns sont inférieurs aux autres et affirmer ainsi la supériorité du « service public » (sans remarquer que le coût final pour l'usager est bien moindre avec une assurance privée, ni que la sécurité sociale étatique ne survit que grâce à la dette publique). De même, le calcul du PIB compte les dépenses de l’État comme une création de richesse !
  4. Par exemple, on comparera les prix administrés, imposés sous la contrainte, avec les prix du marché, pour affirmer la supériorité du « service public » qui peut pratiquer des prix plus bas que ceux du marché.
  5. Pour un contrôleur des finances publiques, Les Echos, 21 mars 2005
  6. L'État, Règne de la Magie Noire
  7. in Wilhelm Meister. Citation intégrale : « Quelle sûreté de coup d’œil nous acquérons dans cette ordonnance qui préside à la conduite nos affaires ! C’est elle qui nous permet de saisir l’ensemble, à n’importe quel moment, sans que nous ayons à nous embarrasser du détail. Que d’avantages le commerçant ne retire-t-il pas de la comptabilité en partie double ? C’est là une des plus belles inventions de l’esprit humain […]. […] Dès que tu auras vu ce que c’est qu’une grande activité commerciale, tu seras définitivement acquis ; et quand tu reviendras, tu te rangeras vite du côté de ceux qui, par des expéditions et des transactions de toute espèce, savent attirer à eux une partie de cette aisance et cet argent qui accomplissent dans le monde leur circuit nécessaire »

Bibliographie

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  • 1938,
    • Ronald Coase, "Business Organization and the Accountant", 12 articles in: The Accountant du 1er octobre au 17 décembre
      • Repris en 1952, In: D. Solomons, dir., Studies in Costing, London, Sweet and Maxwell, pp105-158
      • Repris en 1973, In: James M. Buchanan et Georges F. Thirlby, dir., LSE Essays on cost, New York University Press, New York and London, pp95-132
    • Edward Peragallo, "Origin and Evolution of Double Entry Bookkeeping: A Study of Italian Practice from the Fourteenth Century", New York: American Institute Publishing
  • 1940, Basil Yamey, 'The functional development of double-entry bookkeeping', Accountant, 103, pp333-342
    • Repris en 1984, In: Christopher Nobes, dir., The Development of Double Entry: Selected Essays. New York and London
  • 1944, Basil Yamey, 'Edward Jones's "English system of bookkeeping" ', The Accounting Review, 19, pp407-416
  • 1946, George F. Thirlby, "The Subjective Theory of Value and Accounting Cost", Economica New Series, Vol 13, n°49, Feb., pp32-49
  • 1947, Basil Yamey, "Notes on the Origin of Double-Entry Bookkeeping", The Accounting Review, 22 (3), pp263–272
  • 1949, Basil Yamey, "Scientific Bookkeeping and the Rise of Capitalism", The Economic History Review New Series, Vol 1, n°2/3, pp99-113
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    • Raymond de Roover, "New Perspectives on the History of Accounting", The Accounting Review, 30 (3), pp405–420
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    • Sidney Davidson, "Accounting", In: David L. Sills, dir., "International encyclopedia of the social sciences", Vol 1, London: Macmillan and the Free Press, pp14-21
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  • 1977, Michael Chatfield, "A History of Accounting Thought", Huntington, N.Y.: Robert E. Krieger Press
  • 1978, Basil Yamey, dir., "Essays on the history of accounting", New York: Arno Press, ISBN 0-405-10933-4
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    • S. David Young, "Financial Reporting and the Austrian Theory of Entrepreneurship", Abacus, Vol 23, n°1, March, pp10–16
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  • 2006, Basil Yamey, "Duplicate Accounting Records: Historical Notes, Accounting", Business & Financial History, Vol 16, n°3, pp447-455
  • 2011, J. White, "Double entry: How the merchants of Venice created modern finance", New York: W.W. Norton & Company

Voir aussi

Liens externes


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