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François-Barthélémy Arlès-Dufour

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François-Barthélémy Arlès-Dufour
entrepreneur

Dates 1797 - 1872
François-Barthélémy Arlès-Dufour, entrepreneur français
Tendance saint-simonien,
Nationalité France France
Articles internes Autres articles sur François-Barthélémy Arlès-Dufour

Citation « Cette maison, bien gérée, est une mine d’or, à moins que ses chefs, lassés de beaux bénéfices réguliers, veuillent en obtenir d’extraordinaires en forçant les affaires. »
Interwikis sur François-Barthélémy Arlès-Dufour

François-Barthélémy Arlès-Dufour né le 3 juin 1797 à Sète (Hérault) et mort le 21 janvier 1872 à Vallauris (Alpes-Maritimes) est un négociant en soie lyonnais. C’est une figure exceptionnelle du patronat français du XIXe siècle partagé entre le libéralisme et le saint-simonisme.

L’ascension d’un ambitieux

Fils d’un gendarme de Lodève, il appartient cependant à une famille de commerçants. Exclu du lycée pour indiscipline, il commence, à Paris, à seize ans « une vie de lutte et de travail » comme vendeur puis comme contremaître d’atelier : « je traitais mes ouvriers sévèrement, mais avec le respect que l’homme doit à l’homme. Je me plaçais entre le serviteur et le maître, non pour frustrer le maître, mais pour être utile à tous les deux ».

Fils unique d’une veuve d’officier, il ne peut s’engager dans l’armée impériale et tourne son énergie dans le négoce. En 1816, son employeur l’envoie en Allemagne comme voyageur de commerce. Il ne se contente pas de vendre tissus et châles mais lit aussi Adam Smith, Stuart Mill, Ricardo et assiste en 1820 au cours de Jean-Baptiste Say au Conservatoire. Il apprend non sans difficulté l’anglais et l’allemand et fait la connaissance à Francfort de Prosper Enfantin, le futur prophète du saint-simonisme et à Munich de Gustave d’Eichtal, qui devait être le banquier du mouvement. Le congrès de Carlsbad (1819) le conforte dans son hostilité aux rois et aux prêtres : il est un partisan convaincu de la souveraineté du peuple.

A Leipzig, grande ville de foire, il se lie avec Paul-Émile Dufour qui lui propose d’entrer dans la maison Dufour frères : il prend la direction de la succursale lyonnaise (1822) et épouse la fille unique de son patron en 1824. Dans une lettre du 20 décembre 1847, Arlès souligne : « c’est tout bonnement mon énergie et mon ambition ou si vous voulez mon amour-propre qui ne me permet pas de rester au deuxième rang où que je sois. » Il affirme vite ses capacités à la tête de la succursale, se rend régulièrement à Londres où il se lie d’amitié avec William Leaf, chef de la maison Leaf, Smith and Co. Avec l’aide de quelques associés dont son beau-père, il fonde un peu avant 1830 sa propre maison de commission.

Un marchand de soie lyonnais

Sensible à la question ouvrière et découvrant grâce à John Bowring l’utilitarisme de Jeremy Bentham, il se convertit au saint-simonisme à l’occasion d’un séjour lyonnais de Prosper Enfantin (1828-1829). Il en retient surtout la foi dans la libre concurrence et dans le développement industriel, la passion du travail productif et le goût des vastes entreprises inséparables d’un fort sentiment de solidarité sociale. Il se tient cependant à l’écart des excentricités de la secte, n’adhérant pas à la mystique d’Enfantin qu’il ne cesse de vouvoyer en l’appelant « cher maître » dans sa correspondance.

Sa maison de commission en soies souffre terriblement de la crise de mai 1837 : il est sauvé de la faillite par ses appuis internationaux mais mettra plus de dix ans à récupérer ses créances. La maison Dufour frères & Cie est dissoute et il adopte la raison sociale François Arlès-Dufour (1839) puis Arlès Dufour & Cie. En 1845, la société au capital d’un million fait un chiffre d’affaires de 9 MF et un bénéfice de 346 000 F. En 1856, le capital passe à 3,6 MF et le chiffre d’affaires est de 22 MF. La société ouvre des succursales à Saint-Étienne, Paris, Bâle, Krefeld, Marseille, Londres et New York. Il fait tardivement l’acquisition de moulinages en France et en Italie. La crise de 1857 l’inquiète et il se retire des affaires en 1859, restant commanditaire de la société confiée à ses deux fils aînés et à son gendre : « cette maison, bien gérée, est une mine d’or, à moins que ses chefs, lassés de beaux bénéfices réguliers, veuillent en obtenir d’extraordinaires en forçant les affaires ».

Fondateur et censeur de la Banque de Lyon en 1835, qui devient succursale de la Banque de France en 1848, il participe en 1856 au capital du Deutsche Credit Anstalt fondé par ses amis de Leipzig. Il est un des premiers administrateurs et actionnaires du Crédit industriel et commercial (1858). Il est surtout un des fondateurs du Crédit Lyonnais en 1863 aux côtés de Henri Germain même s’il démissionne vite de ses fonctions d’administrateur. Il est le créateur du Magasin général des soies (1859) société anonyme qui cumule les fonctions d’entrepôt des soies, de lieu de vente et d’organisme de crédit.

Ce saint-simonien est sensible au développement des voies de communication comme actionnaire et administrateur du Paris-Lyon et du Marseille-Avignon et soutient l’idée d’un PLM mais la crise de 1847-1848 entraîne la liquidation de ces intérêts. Il figure cependant parmi les fondateurs de la Compagnie générale maritime (1855). C’est dans sa propriété d’Oullins que naît la société civile d’études pour le percement du canal de Suez même si là aussi l’entrée en scène de Ferdinand de Lesseps va évincer les saint-simoniens.

Bienfaiteur et notable

Il joue un rôle important dans la création du système lyonnais d’enseignement technique. Administrateur dès l’origine de l’école de la Martinière, il crée avec d’autres notables, l’école centrale lyonnaise pour l’industrie et le commerce (1857) qu’il voit comme une « Martinière bourgeoise ». Secrétaire général de la société d’instruction primaire gratuite du Rhône (1828), il fonde en 1864 dans les bureaux du Crédit Lyonnais avec ses amis dont Henri Germain la société d’enseignement professionnel du Rhône pour « procurer à l’ouvrier toutes les facilités pour se perfectionner dans son métier, lui donner les moyens d’aspirer à un salaire plus élevé, lui rendre l’épargne plus facile, relever sa dignité et dégager devant lui la voie qui conduit aux rangs supérieurs de la société ».

Adjoint au maire de Lyon après la révolution de juillet 1830, il est plus spécialement chargé du bureau d’aide sociale dit Comité de travail et de secours. Libéral convaincu, il est hostile au tarif revendiqué par les canuts en 1831 et prend publiquement position en faveur du libre-échange notamment dans Sur les manufactures étrangères (1834). Adversaire du parlementarisme censitaire, il refuse d’être candidat. Il siège à la chambre de commerce de Lyon (1832) et au conseil général du commerce (1835) mais aussi dans les jurys des expositions industrielles de 1839, 1844 et 1849 avant d’assurer la vice-présidence du jury des soieries et rubans lors de l’Exposition universelle de Londres (1851) où il vit un « symbole de solidarité, d’association, de fraternité entre les peuples ». Il devait ensuite présider la classe soies et soieries aux expositions universelles suivantes de 1855 et 1862. Ami de Richard Cobden, qui est lui aussi un commissionnaire, il se trouve mêlé, avec son autre ami Michel Chevalier, à la signature du traité de libre-échange de 1860. Il cumule les décorations, finissant commandeur de la légion d’honneur et titulaires d’ordres autrichien, bavarois, danois, prussien, sarde, saxon, suédois et toscan.

Favorable à un impôt progressif sur tous les revenus, il s’investit dans l’action philanthropique : administrateur de la Caisse des prêts en faveur des chefs d’atelier (1832), cofondateur de la société lyonnaise de secours mutuels et de retraites des ouvriers en soie (1850), créateur d’un dispensaire homéopathique (il a découvert l’homéopathie en Allemagne), initiateur d’une bibliothèque populaire. Il écrit aux ouvriers de la Croix-Rousse en avril 1848 : « j’appelle l’ère de l’association de tous, du riche et du pauvre, du fabricant et de l’ouvrier, par l’organisation du travail, le classement selon la vocation et la rétribution selon les œuvres ». Si son épouse et ses enfants sont luthériens et son gendre, membre du consistoire de l’église réformée de Lyon, Arlès-Dufour n’a pas de pratique religieuse et souhaite par testament des obsèques civiles qui font scandale en 1872. En dépit de son élection à l’académie de Lyon en 1854 et son admission au cercle du commerce, il reste à l’écart de la bourgeoisie traditionnelle. « Prolétaire enrichi » selon ses mots, il laisse une fortune supérieure à 3,6 MF.

Sources

  • Pierre Cayez et Serge Chassagne, notice in Lyon et Lyonnais, Les Patrons du Second Empire, vol. 9, 2006, p. 37-44.


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