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Théorie du déversement

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La théorie du déversement est une théorie économique développée par le démographe et économiste Alfred Sauvy, qui postule que le progrès technique améliorant la productivité engendrent un transfert (déversement) des emplois d'un secteur d'activité vers un autre. Terme par lequel Alfred Sauvy désignait la modification de la structure de la population active entraînée par la croissance économique issue des gains de productivité : il faut à la fois moins de travailleurs dans l'agriculture et dans l'industrie, du fait des gains de productivité, et davantage dans les services, secteur dans lequel se dirige une bonne partie des hausses de revenus engendrées par les gains de productivité.

Elle est formulée en particulier dans La machine et le chômage, paru en 1980 chez Dunod, et présente des similitudes avec la notion de destruction créatrice de Joseph Schumpeter.

Le progrès technique, adversaire de l'emploi et de la croissance ?

La théorie du déversement souligne que le progrès technique ne nuit pas à la croissance et à l'emploi.

Le cliché inverse de la nocivité du progrès technique pour l'emploi et/ou la croissance est fortement ancré dans l'esprit de nombreuses personnes. La conviction que machines détruisent les emplois est. La révolution industrielle a connu des manifestations très violentes, comme le mouvement luddite dans l'industrie textile en Angleterre ou celui des canuts lyonnais, jetant les métiers à tisser dans le Rhône. Aujourd'hui, c'est l'informatique ou l'intelligence artificielle qui sont accusées à tort de « voler » l'emploi.

Alfred Sauvy, également inventeur de l'expression Tiers-Monde, forgea sa théorie du déversement pour illustrer que le changement technique ne supprime pas les emplois, mais qu'il les déplace. Il montra que le progrès technique a des effets positifs sur la croissance et l'emploi à long terme. Les innovations sont le principal moteur de la croissance à long terme, ce qui compense largement les pertes d’emploi à court terme.

L'innovation technologique engendre des gains de productivité qui se traduisent par des hausses de salaires ou des baisses de prix, et donc un accroissement du pouvoir d'achat. La partie du gain qui revient aux actionnaires via les profits, permet soit une hausse d'investissements (croissance de la consommation de biens d'équipement) soit une hausse de la consommation de biens finaux. Les entreprises doivent donc embaucher pour s'ajuster à la croissance de la nouvelle demande.

Il y a donc un effet de déversement des emplois, des secteurs qui en détruisent vers ceux qui en créent. La disparition des moines copistes par la technologie de l'imprimerie a été largement compensée par les emplois créés par cette nouvelle technologie.

Le progrès technique, principal levier de la croissance

Alfred Sauvy et Jean Fourastié considèrent en commun que l'analyse classique se trompe. « Ce n’est pas l’accumulation du capital et de l’épargne qui est le facteur déterminant des transformations de la société, mais le taux de progrès technique »[1]. Il se rapproche donc des économistes évolutionnistes tel Joseph Schumpeter, économiste de l’innovation, ou de Friedrich Hayek. Ce sont les changements culturels, les coutumes, l'apprentissage par essais et erreurs, donc les facteurs de la « connaissance », qui sont précurseurs de la croissance.

La théorie du déversement repose donc, comme la théorie autrichienne des cycles, sur la possibilité de la main d'œuvre de s'adapter rapidement au changement grâce à la formation et aux exigences nouvelles de l'économie. Alors que l'approche autrichienne est praxéologique, la présentation d'Alfred Sauvy est historique et empirique. Cette insuffisance méthodologique l'amène à être très critiquée par les opposants au progrès technique.

Il existe, en effet, une forme de viscosité à la qualification des individus. Il est plus long d'apprendre un nouveau métier que pour un produit de changer de prix. Cependant, la faute n'est pas imputable au marché :

  • Du fait des pratiques sociales et de certains droits acquis, certains travailleurs ne sont pas motivés pour investir en temps dans une formation (travailleur âgé ou chômeur de longue durée).
  • Les politiques législatives et obligatoires de réduction du temps de travail confisquent les gains de productivité au mépris des augmentations de pouvoir d'achat, renforçant le sentiment négatif des travailleurs vis à vis d'une formation inutile
  • L'éviction du marché des spécialistes de risques liés à la formation, comme les assureurs, explique aussi ce phénomène. Les cotisations sociales obligatoires sont gérées par les partenaires sociaux. Les recettes sont collectivisées mais les risques ne sont pas gérés individuellement. Le coût du chômage est mutualisé. L'Éducation nationale n'a pas pour vocation de prévoir le marché mais de former des individus. En occupant le terrain de la gestion des risques sans être contraintes par des conditions du marché, elles détournent et gaspillent des ressources humaines, souvent inéluctablement.
  • Le prix est un signal de communication très important pour faire comprendre aux différents acteurs économiques (entreprises et travailleurs) que certains emplois sont très recherchés (goulet d'étranglement) alors que d'autres sont pléthoriques. Or, en instituant un prix minimal au salaire, les travailleurs de faible qualification n'ont aucun signal d'alerte d'anticipations opportunes. Ils résident dans une zone de flou et, lorsque le prix du salaire est bien au-delà des normes, il est déjà trop tard pour réagir.
  • De plus, les périodes fastes pour des salaires élevés sont courtes, à l'image d'un champion de tennis. Donc, les limitations de travail par une réglementation restrictive ou des politiques fiscales dissuasives restreignent les motivations des travailleurs de s'adapter pour des emplois à durée courte et fortement rémunérateurs.

Notes et références

Bibliographie

Voir aussi


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