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Contrat social

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En philosophie politique, le contrat social est une théorie qui cherche à déterminer les fondements d'une société civile idéale qui se serait formée suite à un hypothétique « contrat » passé entre individus consentants. Selon la théorie, la formation d'une association, entre la société et le souverain, réunis en un corps politique unique, permet de garantir la paix sociale mais aussi la légitimité du pouvoir.

La doctrine du contrat social entends expliquer, d'une façon générale, l'origine du pouvoir politique, le commencement et différentes formes de sociétés politiques, l'établissement du pouvoir législatif et exécutif de l'État et son rapport avec la société civile.

Les principaux penseurs du contractualisme social, sont essentiellement des penseurs classiques ayant vécu au XVII et XVIIIe siècles. Bien que Épicure soit considéré comme le précurseur, Thomas Hobbes, John Locke et Rousseau sont considérés comme les principaux théoriciens. Ainsi, pour Hobbes (Léviathan, 1651) le contrat social assure la sécurité des sujets du souverain en mettant fin à l’état de nature ; pour John Locke, il permet à l’État de sauvegarder la liberté et la propriété des sujets. Toutefois les sujets peuvent rompre ce « contrat » quand l’État outrepasse ses fonctions.

En revanche, d'autres penseurs, majoritairement libertariens, s'opposent aux principaux principes théoriques ainsi qu'aux conclusions tirées. La notion même de contrat social reste suspecte et douteuse. Ils pensent, au contraire, que les droits dont les individus jouissent, ne résultent pas d'une volonté collective fictive, mais proviennent plutôt de la découverte des droits naturels.

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Critique libertarienne

Le pacte social, basé sur un consentement volontaire des hommes, présuppose fonder la légitimité de la souveraineté étatique. Selon les libertariens, cette base « ontologique » sur les fondements de la coexistence des individus en société est un calcul spéculatif. Le contrat social n'est donc pas un contrat réel. Dans un premier temps, il est impossible de définir l'identité des prétendus contractants. Même dans l'hypothèse où on retrouverait une quelconque trace des prétendus signataires, cela ne signifierait pas un engagement perpétuel de la part des successeurs. Dans un deuxième temps, le terme « contrat social » tente de faire croire qu'il existerait un consentement des citoyens, et, partant de là, la société civile se serait constituée en un corps unique mû par un désir de monopole de la violence pour garantir la sécurité. Cette volonté de tromper par la seule force du nom permettra à ses détracteurs de classer le terme « contrat social » parmi les mot-virus. Or il n'existe aucun consentement volontaire et explicite. Il n'existe non plus aucun consentement tacite.

En tant que pure fiction, le contrat social peut-il jouer comme une norme du politique ? L'erreur fondamentale de ce genre de « contractualisme » social est encore de placer les individus comme des pièces d'une sorte de machine d'asservissement où le pouvoir civil serait doté d'une conscience, d'une raison ou encore d'une volonté unique. La conception du « contrat social » est bien un constructivisme socio-politique servant d'instrument à un contrat de soumission.

La justification de l'action étatique agressive, par exemple la fiscalité, par un recours au concept de contrat social et de consentement à l'impôt, se réfute facilement : l'impôt rentrerait-il aussi facilement si l’État décrétait qu'il était facultatif, réellement dépendant du consentement individuel ?

Une autre idée véhiculée par la doctrine du contrat social, faisant plutôt appel aux sentiments moraux, est celle que la création d'un contrat social servirait à contrôler les motifs égoïstes des hommes. Cette formulation découle d'une autre idée qu'est celle d'une coopération sociale soumise au contrôle d'un esprit ingénieur corrigeant l'imperfection humaine grâce à un processus social.

Le concept de contrat social peut d'ailleurs servir de prétexte au totalitarisme ou à la démocratie totalitaire : il en est ainsi de la conception rousseauiste du contrat social, qui repose sur un insaisissable « volonté générale » censé dépasser les intérêts particuliers, mais en réalité à la discrétion du potentat du moment, fût-il démocratiquement élu :

« Les clauses du contrat social se réduisent à une seule, savoir l'aliénation totale de chaque associé avec tous ses droits à la communauté ». ... « Chacun de nous met en commun sa personne et toute sa puissance sous la suprême direction de la volonté générale ». (Jean-Jacques Rousseau, Le contrat social, chap. VI)

Bibliographie

  • 1996, Brian Skyrms, "Evolution of the Social Contract", Cambridge and New York: Cambridge University Press

Citations

  • «  Je ne connais aucun système de servitude, qui ait consacré des erreurs plus funestes que l’éternelle métaphysique du contrat social. »
        — Benjamin Constant, Principes de politique

  • «  Le contrat social n'existe pas parce qu'il n'y a pas de droit de sécession individuel, ni territorial […]. La notion de consentement veut dire que l'on peut vendre ses droits de vote, que l'on peut créer un État, que l'on peut objecter, que l'on peut choisir un statut de métèque ou le droit d'ignorer l'État. En absence de ces règles assurant le consentement, il n'existe ni consentement ni contrat social. »
        — Bertrand Lemennicier

  • «  L’État n'a jamais été créé par un "contrat social" ; il naquit toujours de la conquête et de l'exploitation. »
        — Murray Rothbard

  • «  Sans parler de la question historique de savoir s’il a jamais été conclu, le contrat social, soit dans sa version hobbesienne de renoncement de l’individu à tous ses Droits, soit dans sa version lockéenne d’abandon du Droit de légitime défense, ne contient que des promesses de comportement futur (volonté future) et ne cède aucun titre de propriété aliénable. Une promesse passée, qui ne lie certes pas les générations futures, ne lie pas davantage celui qui l’a faite. »
        — Murray Rothbard

  • «  Rawls dit (idée rousseauiste) "il faut faire un contrat social parce que l'Etat doit organiser la société". Mais si la société est constituée de relations volontaires entre les personnes, on n'a pas besoin d'un contrat social superposé aux contrats sociaux existants. La société est déjà parfaitement organisée quand les relations sont volontaires. (...) La responsabilité, qui résulte des rapports interpersonnels volontaires, est nécessaire et suffisante pour que la société soit régulée. On n'a pas besoin du Deus ex machina pour régler les problèmes. »
        — François Guillaumat

  • «  L’État agit dans un véritable vide juridique. Il n’y a aucun contrat réel entre l’État et ses citoyens. Ce qui doit être protégé n’est absolument pas défini contractuellement. Rien n’est formalisé à propos du service promis par l’État à ses citoyens, rien ne dit ce qui adviendra en cas d’échec dans la fourniture de ce service, rien ne précise le prix que les « consommateurs » d’un tel « service » devront payer. Bien au contraire, c’est l’État qui fixe arbitrairement les règles du jeu et qui s’arroge le droit de les modifier en cours de partie, en légiférant. »
        — Hans-Hermann Hoppe

  • «  Contrat social : c'est un contrat sans contractants mais qui dit que tout le monde perd ses droits de par le consentement de tout le monde... »
        — Thierry Falissard

  • «  Une quelconque horde de fauves blonds, une race de conquérants et de maîtres qui, organisée pour la guerre et douée de la force d’organiser, pose ses formidables griffes sur une population qui est peut-être très supérieure en nombre, mais encore informe et errante. Car c’est bien ainsi que l’ « État » commence sur terre  : j’estime qu’on s’est défait de l’idée exaltée qui l’a fait commencer par un « contrat ». »
        — Friedrich Nietzsche, Généalogie de la morale

  • «  On nous dit que nous avons passé un contrat social dans lequel nous abandonnons une partie de nos libertés pour permettre à un arbitre supérieur de trancher. Le problème, c’est que ni vous ni moi n’avons jamais signé explicitement ou implicitement ce fameux contrat, si souvent répété que la vertu espérée de cette répétition est de nous éviter absolument de jamais réfléchir à cette question. Pourquoi ? En imaginant même l’idée absurde d’un contrat social signé dans le passé, serais-je engagé, moi, individu du XXIe siècle ? En naissant, nous transférerions et abandonnerions quelque chose aux hommes de l’État ? Jusqu’à éventuellement notre vie ? »
        — Serge Schweitzer

  • «  Rousseau, dont l’autorité nous régit depuis près d’un siècle, n’a rien compris au contrat social. (...) Le contrat social est de l’essence du contrat commutatif : non-seulement il laisse le contractant libre, il ajoute à sa liberté ; non-seulement il lui laisse l’intégralité de ses biens, il ajoute à sa propriété ; il ne prescrit rien à son travail, il ne porte que sur ses échanges : toutes choses qui ne se rencontrent point dans le contrat de société, qui même y répugnent. »
        — Proudhon

  • «  Il n'y a pas, il ne peut pas y avoir de contrat social, d'abord parce que la société n'est pas un artifice, un fait scientifique, une combinaison de la mécanique ; la société est un phénomène providentiel et indestructible ; les hommes, comme tous les animaux de mœurs douces, sont en société par nature. L'état de nature est déjà l'état de société ; il est donc absurde, quand il n'est pas infâme, de vouloir constituer, par un contrat, ce qui est constitué de soi et à titre fatal. »
        — Anselme Bellegarrigue

  • «  J'ai écrit que Le Contrat social de Rousseau n'était pas vraiment un contrat, mais un document inscrivant la reddition totale du désordre à l'ordre. Le fait qu'il viole la loi naturelle se manifeste dans son incapacité à devenir une réalité sociale sans le soutien des armes à feu et des policiers. Ce que nous pouvons observer, c'est que l'individu a des obligations envers le groupe, car le groupe a des obligations envers l'individu : c'est un contrat d'équité. »
        — Robert Ardrey, Le Contrat social

  • «  Il n'est pas besoin d'un Etat pour faire respecter les contrats et l'« hédonisme politique », consistant à penser que les hommes ont rationnellement décidé de la création d'un Etat, parce que ses bienfaits l'emporteraient sur ses inconvénients potentiels, est logiquement faux. Il convient alors d'affirmer qu'il n'y a pas de justification rationnelle à l'Etat. Sa naissance est un hasard de l'Histoire et le fameux « contrat social » n'est pas nécessaire, les contrats interindividuels suffisant à assurer la coopération sociale. »
        — Pascal Salin, Préface à L'Etat - La logique du pouvoir politique d'Anthony de Jasay, 1994

  • «  Pour Rousseau, le citoyen idéal est un esclave qui agit librement. La citoyenneté se définit comme la condition d’un homme qui, « par contrat », renonce à tous ses droits personnels et à la liberté individuelle, sous prétexte qu’il est devenu une parcelle de la volonté générale. »
        — Jean-François Revel, Le Regain démocratique

Liens externes

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