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Herbert Spencer

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Herbert Spencer
Philosophe

Dates 1820 - 1903
Herbert Spencer, philosophe du darwinisme social et de l'évolutionnisme
Tendance Minarchiste
Nationalité Royaume-Uni Royaume-Uni
Articles internes Autres articles sur Herbert Spencer

Citation « La fonction du libéralisme dans le passé a été de mettre une limite aux pouvoirs des rois. La fonction du vrai libéralisme dans l'avenir sera de limiter le pouvoir des parlements. »
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Herbert Spencer, né à Derby le 27 avril 1820 et mort le 8 décembre 1903, est un philosophe, sociologue et économiste minarchiste anglais, connu comme théoricien de l'évolutionnisme et du darwinisme social, qu'il appliqua avant l'heure aux sociétés humaines.

Biographie d'Herbert Spencer

Il nait dans une famille de radicaux, dissidents de l'anglicanisme, et dont il hérita le refus de l'autorité sous toutes ses formes. Il s'instruit dans le cadre familial, à la Derby Philosophical Society ou auprès de son oncle, le révérend Thomas Spencer. Il choisit finalement de ne pas aller à Cambridge mais continue à s'instruire par lui même dans le domaine des sciences sociales.

Très jeune, il se passionne pour les questions politiques et s'affilie à de nombreuses associations ; il devient ainsi membre de l'Anti-Corn Law League, fondée par Richard Cobden en 1838, qui fait campagne contre les lois protectionnistes sur les importations de céréales. À dix-sept ans, il s'oriente vers la profession d'ingénieur des chemins de fer, qu'il exerce entre 1837 et 1841. Il abandonne rapidement cette voie pour se tourner vers le journalisme alors qu'il a tout juste une vingtaine d'années.

Avant de devenir un écrivain populaire, Herbert Spencer était employé comme sous-rédacteur en chef à The Economist. Bien qu'il partageait les convictions de James Wilson et Thomas Hodgskin, Spencer n'avait aucune implication éditoriale, travaillant plutôt sur le contenu statistique et factuel de la revue. il y rédige de nombreux articles entre 1848 et 1853 et rencontre l'écrivain britannique George Eliot. Il commence alors à rédiger de nombreux ouvrages originaux, dont les Social Statics (1851), fortement inspirés par l'utilitarisme benthamien ou A Theory of Population (1852), où il conteste le catastrophisme de Thomas Malthus. Il quitta The Economist en 1853, dès qu'il a pu subvenir à ses besoins en tant qu'auteur et grâce à un héritage. Cela lui permet de se consacrer à temps complet à son œuvre philosophique et sociologique. Il rédige en 1855 ses Principles of Psychology dans lesquels il attaque les vues de John Stuart Mill. Son grand œuvre consistera en l'élaboration des Principles of Sociology (dont la publication s'étalera de 1876 à 1897).

Toute sa vie, Spencer fut un ennemi de la guerre et de l'impérialisme, qui sont tous deux les expressions accomplies de l'étatisme. C'est pourquoi il s'opposera à la guerre hispano-américaine de 1898 et qu'il essaiera de fonder une « Ligue contre l'agression » vers la fin de sa vie alors que les pays européens s'opposent de plus en plus.

Il meurt en 1903. Son opposition au « monopole » de l'Église anglicane sur le « marché » de la religion lui vaut de ne pas être enterré dans la Cathédrale de Canterbury en raison de l'opposition de l'archevêque du lieu. Il est enterré dans le cimetière de Highgate, juste en face de la tombe de Karl Marx.

Herbert Spencer : le précurseur des idées évolutionnistes et du darwinisme social

Connu comme l'un des principaux défenseurs de la théorie de l'évolution au XIXe siècle, sa réputation à l'époque rivalisait avec celle de Charles Darwin (il est l'auteur de l'expression « sélection des plus aptes »). Il a été le premier à développer des positions évolutionnistes, dès 1850, soit une dizaine d'année avant la parution de L'Origine des espèces de Charles Darwin. Spencer appliqua initialement ses théories évolutionnistes à des domaines comme la philosophie, la psychologie et la sociologie, dont il est reconnu comme l'un des fondateurs de la discipline. Sa théorie fut appelée postérieurement, et erronément, « darwinisme social ». Or Spencer est resté toute sa vie un disciple de Lamarck : il croyait en l'hérédité des caractères acquis.

Il n'était donc pas pour la suppression de toute solidarité mais pour la solidarité volontaire : il distingue ainsi la morale sociale (à chacun selon ses mérites) et la morale familiale (aider le pauvre), écrivant que « la loi de la famille est l'inverse de la loi de la société ». Vouloir ériger la morale familiale en règle de la vie sociale comme le fait le socialisme, c'est in fine faire s'effondrer toute morale et rendre pire la situation de tous. La solidarité doit donc émaner des individus, de façon volontaire. À l'inverse, l'étatisme communiste fait de l'individu un esclave de la société.

L'endroit où il résume le mieux sa pensée est le chapitre XIX des Social Statics qui s'intitule Le Droit d'ignorer l'État, formulation classique du droit de se passer des services de l'État et, donc, du droit de sécession individuelle qu'il légitime lorsque la puissance gouvernante abuse de son pouvoir. Spencer est un défenseur de l'État minimal (réduit donc strictement au maintien de la sécurité intérieure et extérieure, ainsi qu'il l'explique dès The Proper Sphere of Government en 1842). Comme John Locke, il défend la contractualisation des relations entre individus et État. Pour lui, le gouvernement est un simple employé que chacun est libre de révoquer, sans que cela attente aux droits d'autrui.

Spencer défend par ailleurs une philosophie de l'Histoire selon laquelle les sociétés industrielles (ouvertes, dynamiques, productives, reposant sur le contrat et la liberté individuelle) supplanteront progressivement les sociétés militaires (guerrières, hiérarchiques, holistes, figées, fermées sur elles-mêmes). Au final, l'État deviendra lui-même un élément archaïque et obsolète. Son existence, selon Herbert Spencer, ne repose que sur la faiblesse morale des gens. L'État est une tyrannie nécessaire tant qu'il y aura des voleurs et des assassins. S'il n'y en avait pas, logiquement les prisons seraient inutiles. Par conséquent, l'humanité n'aura plus besoin de l'État si elle progresse moralement. Les avocats, les juges, les jurys, tous les instruments de la loi, existent simplement parce que la fourberie est présente dans la société. On peut dire que Spencer est un minarchiste qui est convaincu de la probabilité d'un avenir anarcho-capitaliste.

Influence

Herbert Spencer a été extrêmement populaire en son temps, aussi bien dans son pays que dans nombre d'autres pays du monde. Il conseilla l'empereur du Japon et ses livres étaient distribués dans les écoles françaises en récompense lors des cérémonies des prix. Georges Clemenceau se déplaça pour le voir en Grande Bretagne. Parmi ses disciples en son temps figuraient Andrew Carnegie, industriel et philanthrope qui échangea avec lui une correspondance dans laquelle il couvre Spencer d'éloges.

Sa théorie évolutionniste, qu'il est l'un des premiers à formuler, avant Charles Darwin, a été amplement commentée à l'époque par des auteurs comme John Stuart Mill, Nietzsche, Durkheim ou Bergson.

Aujourd'hui il est surtout connu pour ses essais politiques, ceux-ci sont notamment cités par des penseurs libéraux comme Robert Nozick. Friedrich Hayek se réfère également à lui à plusieurs reprises dans Droit, législation et liberté. En effet, les deux auteurs communient dans la vision du choix des institutions comme fruit d'une sélection naturelle.

Si il est désormais peu connu en France, ses écrits sont régulièrement commentés et étudiés par de nombreux auteurs dans le reste du monde.

Citations

  • « Puisqu'on n'invoque plus la théologie, autrefois fondée en logique d'après laquelle celui qui gouverne sur cette terre étant le représentant de celui qui gouverne dans le ciel, c'est un devoir de lui obéir en toutes choses, demandons quelle raison il y a d'accepter comme un devoir l'obéissance en toutes choses à un gouvernement constitutionnel ou républicain, dont la suprématie ne se réclame pas du ciel. » (Le Droit d’ignorer l’État, 1850)
  • « Si chaque homme a la liberté de faire tout ce qu'il veut, pourvu qu'il n'enfreigne pas la liberté égale de quelque autre homme, alors il est libre de rompre tout rapport avec l'État, – de renoncer à sa protection et de refuser de payer pour son soutien [...] il a par conséquent le droit de se retirer ainsi. » [1]
  • « La fonction du libéralisme dans le passé a été de mettre une limite aux pouvoirs des rois. La fonction du vrai libéralisme dans l'avenir sera de limiter le pouvoir des parlements. »
  • « Non seulement les socialistes, mais encore les prétendus libéraux, qui leur préparent la voie, croient qu'avec de l'adresse les défauts de l'humanité peuvent être corrigés par de bonnes institutions. C'est une illusion. Quelle que soit la structure sociale, la nature défectueuse des citoyens se manifestera dans les mauvais effets qu'elle produira. Il n'y a point d'alchimie politique à l'aide de laquelle on puisse transformer des instincts de plomb en une conduite d'or. »
  • « L'impôt est une restriction de liberté. »
  • « Tout socialisme conduit à l'esclavage de l'individu. Car qu'est-ce qu'un esclave ? C'est quelqu'un dont autrui est le propriétaire. Pour ne pas rester nominale, la propriété implique le contrôle des actes de l'esclave au profit du contrôleur. Ce qui définit exactement un esclave qui travaille sous la coercition pour satisfaire les désirs de quelqu'un d'autre. » (Fortnightly Review, janvier 1884)
  • « Si chaque homme a la liberté de faire tout ce qu'il veut, pourvu qu'il n'enfreigne pas la liberté égale de quelque autre homme, alors il est libre de rompre tout rapport avec l'État - et de fait renoncer à sa protection et de refuser de payer pour son soutien. Il est évident qu'en agissant ainsi il n'empiète en aucune manière sur la liberté des autres, car son attitude est passive, et tant qu'elle reste telle, il ne peut devenir un agresseur. Il est également évident qu'il ne peut être contraint de continuer à faire partie d'une communauté politique sans une violation de la loi morale, puisque la qualité de citoyen entraîne le paiement de taxes et que la saisie des biens d'un homme contre sa volonté est une infraction de ses droits. »
  • « Ce sont les partisans de l'égalitarisme et du socialisme d'État qui se sont montrés les antispencériens les plus efficaces. Ils ont accusé Spencer de "darwinisme social", ce qui est une erreur historique puisque, si influence il y a eu, c'est plus Spencer qui a précédé en matière d'évolutionnisme. L'accusation est d'ailleurs doublement erronée car, en biologie, Spencer était un disciple de Lamarck. Mais l'image d'un libéral favorable à une sélection sociale sans pitié analogue à la féroce sélection naturelle a discrédité dans une large mesure l'oeuvre antiétatiste de Spencer durant un XXème siècle dominé par les idéaux socialistes, étatistes et égalitaires. Personne ne se hasardait plus à le citer sous peine d'être diabolisé politiquement. » (Yvan Blot, Herbert Spencer - un évolutionnisme contre l'étatisme)
  • « Nos socialistes sont des décadents, mais M. Herbert Spencer lui aussi est un décadent, — il voit dans le triomphe de l’altruisme quelque chose de désirable !... » (Friedrich Nietzsche, Le crépuscule des idoles - Flâneries inactuelles)

Notes et références

  1. Le Droit d'ignorer l’État (1851), trad. franç. M. Devaldès, Paris, Les Belles Lettres, "Iconoclastes", 1993, p. 15

Informations complémentaires

Œuvres

Herbert Spencer
  • 1858, "State-Tamperings with Money and Banks", Westminster Review, Vol 13, pp210–232
  • 1862, First Principles, 2 vols. London: Williams and Norgate
  • 1864 - 1867, Principles of Biology, 2 vols, London: Williams and Norgate
  • 1870 - 1872, Principles of Psychology, 2 vols., London: Williams and Norgate
  • 1873-1893, "Principles of Sociology", 3 vols, London: Williams and Norgate
    • Nouvelle édition en 1975, "The Principles of Sociology", Westport, Conn.: GreenWood Press, 3 vols.
  • 1874, Principles of Ethics, 2 vols, London: Williams and Norgate
    • Nouvelle édition en 1978, "The Principles of Ethics", Indianapolis: Liberty Classics, 2 vols.
  • 1884, The Man Versus the State, London: Williams and Norgate
    • Nouvelle édition en 1981, "The Man Versus the State", with Six Essays on Government, Society, and Freedom Indianapolis: Liberty Classics
      • Traduction en français en 1885 par J. Gerschel, "L’individu contre l’État", Paris
      • Traduction en espagnol en 1984, "El individuo contra el Estado", Madrid: Orbis
  • 1889, The Study of Sociology, London: Kegan Paul, Trench
  • 1896, "Education", New York: D. Appleton
  • 1898, 'What is Social Evolution?', Nineteenth Century, 259, Septmeber, pp348-358
  • 1902, "Patriotism, Facts and Comments", New York: D. Appleton & Co.

Littérature secondaire

  • 1895, Eugène de Roberty, "Auguste Comte et Herbert Spencer", Paris, (2nd ed)
  • 1904,
    • David Duncan, "Life and Letters of Herbert Spencer", New York: D. Appleton, 2 vols
    • Giuseppe Zuccante, "Herbert Spencer", Commemorazione letta alla R. Accademia Scientifico-Letteraria di Milano il 30 gennaio 1904. Vicenza: Stab. Tip. L. Fabris e C.
  • 1971, John D. Y. Peel, "Herbert Spencer, The Evolution of a Sociologist", London: Heinemann
  • 1972, John D. Y. Peel, dir., "Herbert Spencer on Social Evolution", Chicago: University of Chicago Press
  • 1975, P. J. Bowler, Herbert Spencer and "Evolution": An Additional Note, Journal of the History of Ideas, vol. 36, n°2
  • 1983, Andreas K. Winterberger, Herbert Spencer – Denker der Freiheit. Zum 80. Todestag des englischen Philosophen und Soziologen [Herbert Spencer - penseur de la liberté. 80e anniversaire de la mort du philosophe et sociologue anglais], Zürichsee-Zeitung, 8. Dezember
  • 1985, Jonathan H. Turner, "Herbert Spencer: A Renewed Appreciation", Beverly Hills, CA: Sage
  • 1992, M. W. Taylor, "Men Versus the State: Herbert Spencer and Late Victorian Individualism", Clarendon Press, Oxford
  • 1998,
    • Enzo Di Nuoscio, La razionalità delle azioni e delle credenze nell'epistemologia di Herbert Spencer, Nuova Civiltà delle Macchine, vol 63-64, n°3-4, pp162-166
    • David Weinstein, "Equal Freedom and Utility: Herbert Spencer’s Liberal Utilitarianism", New York: Cambridge University Press
  • 2000,
    • Enzo Di Nuoscio, Epistemologia dell’azione e ordine spontaneo. Evoluzionismo e individualismo metodologico in Herbert Spencer, Soveria Mannelli: Rubettino
    • P. Werhane, "Business Ethics and the Origins of Contemporary Capitalism: Economics and Ethics in the Work of Adam Smith and Herbert Spencer", Journal of Business Ethics, 24(3), pp185-198
  • 2006, John Scott, "Herbert Spencer", In: John Scott, dir., "Fifty Key Sociologists: The Formative Years", Routledge, pp166-171
  • 2007,
    • Nils Goldschmidt, "Herbert Spencer: The Man versus the State", In: Gerhard Schwarz, Gerd Habermann et Claudia Aebersold Szalay, dir., "Die Idee der Freiheit: Eine Bibliothek von 111 Werken der liberalen Geistesgeschichte" ("L'idée de la liberté: Une bibliothèque de 111 oeuvres de l'histoire intellectuelle libérale"), Frankfurter Allgemeine Buch, ISBN 3899811364, pp202-203
    • Thomas Gondermann, Progression and retrogression: Herbert Spencer's explanations of social inequality, History of the Human Sciences, Vol. 20, n°3, pp21-40
    • Mark Francis, "Herbert Spencer and the Invention of Modern Life", Ithaca, NY: Cornell University Press
  • 2015, Matt Zwolinski, "Social Darwinism and Social Justice: Herbert Spencer on Our Duties to the Poor", In: Camilla Boisen, Matthew Murray, dir., "Distributive Justice Debates in Social and Political Thought: Perspectives on Finding a Fair Share, New York: Routledge
  • 2017, Mike Gane, "Comte and His Liberal Critics: From Spencer to Hayek", In: Andrew Wernick, dir., "Anthem Companion to Auguste Comte", New York: Anthem Press, pp205-225

Liens externes


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